Cass. com., 22 mars 2016, pourvoi n°14-21.267
Le liquidateur judiciaire ne pouvant agir que dans l’intérêt de tous les créanciers, il n’a pas la qualité pour poursuivre la vente d’un immeuble ayant fait l’objet d’une déclaration notariée d’insaisissabilité publiée avant l’ouverture de la liquidation judiciaire […]
Ce qu’il faut retenir : Le liquidateur judiciaire ne pouvant agir que dans l’intérêt de tous les créanciers, il n’a pas la qualité pour poursuivre la vente d’un immeuble ayant fait l’objet d’une déclaration notariée d’insaisissabilité publiée avant l’ouverture de la liquidation judiciaire, même si le créancier antérieur auquel est inopposable cette déclaration a donné son accord sur la vente.
Pour approfondir : Consacré pour la première fois par la Cour de Cassation dans un arrêt du 28 juin 2011 (Cass. Com. 28 juin 2011, n°10-15482), le principe selon lequel le liquidateur judiciaire ne peut agir pour réaliser un bien immobilier objet d’une déclaration notariée d’insaisissabilité réalisée antérieurement à la liquidation judiciaire, est justifié par la Haute juridiction en raison de la mission légale assignée au liquidateur judiciaire lequel doit représenter l’intérêt collectif de l’ensemble des créanciers et non pas le seul intérêt des créanciers antérieurs à la déclaration notariée d’insaisissabilité.
L’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de Cassation rendu le 22 mars 2016, qui en est une nouvelle illustration, va plus loin puisqu’il réaffirme cette solution même dans l’hypothèse où le créancier antérieur, auquel est inopposable ladite déclaration d’insaisissabilité, donnerait son accord à la vente du bien immobilier concerné.
Exerçant le droit qui lui est consenti par l’article L. 526-1 du Code de commerce, un entrepreneur individuel a procédé à une déclaration notariée d’insaisissabilité publiée au bureau des hypothèques et rendant insaisissable sa résidence principale par ses créanciers professionnels dont les droits sont nés postérieurement à la déclaration.
Soumis à une procédure de liquidation judiciaire quelques années plus tard, le liquidateur judiciaire de cet entrepreneur a poursuivi la réalisation du bien immobilier concerné par la déclaration d’insaisissabilité.
Fort de l’accord du seul créancier antérieur auquel était inopposable cette déclaration, le liquidateur judiciaire avait estimé qu’il avait dès lors qualité pour agir.
C’est également en ce sens que le Juge-commissaire a fait droit à cette demande.
Consacrant la solution communément admise selon laquelle le liquidateur judiciaire n’a pas qualité en tout état de cause pour poursuivre la réalisation d’un bien protégé par une déclaration d’insaisissabilité, la Cour d’Appel a en revanche censuré l’ordonnance rendue par le Juge-commissaire considérant que ce faisant le Juge-commissaire avait excédé ses pouvoirs.
La Cour de cassation approuve la Cour d’appel et rejette le pourvoi en cassation considérant que le Juge-commissaire avait excédé ses pouvoirs en autorisant le liquidateur à procéder à la vente d’un meuble dont l’insaisissabilité lui était opposable, peu important que le créancier antérieur se soit déclaré favorable à la vente dudit bien.
A rapprocher : Cass. com., 28 juin 2011, pourvoi n°10-15.482