CE, 12 octobre 2016, n°391092
Par un arrêt en date du 12 octobre 2016, le Conseil d’Etat a considéré que le fait que deux constructions ne puissent pas fonctionner ou être exploitées indépendamment l’une de l’autre, n’est pas suffisant pour caractériser un ensemble immobilier unique…
Ce qu’il faut retenir : Par un arrêt en date du 12 octobre 2016, le Conseil d’Etat a considéré que le fait que deux constructions ne puissent pas fonctionner ou être exploitées indépendamment l’une de l’autre, n’est pas suffisant pour caractériser un ensemble immobilier unique. Ainsi des éoliennes et un poste de livraison, pourtant indispensable au fonctionnement de celles-ci, ne sont pas considérés comme un ensemble immobilier unique et peuvent ainsi faire l’objet de demandes d’autorisation d’urbanisme distinctes.
Pour approfondir : En l’espèce, le Préfet du département de la Creuse avait été saisi de demandes de permis de construire distinctes, portant sur la construction de cinq éoliennes d’une part, et d’un poste de livraison d’autre part. Il avait décidé d’autoriser la construction des éoliennes mais avait refusé celle du poste de livraison qui permettait pourtant le raccordement au réseau public.
Le point était donc de savoir si les éoliennes et le poste de livraison devaient être qualifiés d’ensemble immobilier unique.
En droit de l’urbanisme, la qualification ou non d’ensemble immobilier unique est essentielle. Elle permet de déterminer si les projets de constructions envisagés doivent faire l’objet d’une ou de plusieurs demandes d’autorisation d’urbanisme.
Lorsque des constructions sont distinctes, le principe veut que des demandes de permis de construire distinctes soient sollicitées pour chacune d’elles.
Cependant, si ces constructions ont un lien physique, fonctionnel ou urbanistique, celles-ci sont alors considérées comme un ensemble immobilier unique devant faire l’objet d’une demande unique d’autorisation d’urbanisme.
Le Conseil d’Etat a d’ailleurs pu considérer que deux corps de bâtiments séparés au rez-de-chaussée par un passage ouvert et comportant chacun une toiture indépendante, mais qui communiquent à partir du premier étage et dont les logements sont accessibles par un même escalier et desservis par des circulations communes, constituent un ensemble immobilier unique (CE, 25 septembre 1995, Commune de Claye-Souilly, n°120438).
A l’inverse, lorsque le projet concerne un seul et même immeuble, c’est un permis de construire unique qui doit être sollicité.
Néanmoins, un ensemble immobilier unique peut donner lieu à la délivrance de permis de construire distincts quand l’ampleur et la complexité du projet le justifie. Ainsi chaque autorisation d’urbanisme sollicitée doit porter sur les éléments de construction ayant une vocation fonctionnelle autonome (CE, 17 juillet 2009, Ville de Grenoble, n°301615).
Sur la base de ce principe, le Conseil d’Etat avait donc précisé qu’une antenne relais et le local technique indispensable à son fonctionnement étaient un ensemble immobilier unique (CE, 9 juillet 2014, Commune de Chelles, n°373295)
Néanmoins, par l’arrêt ici commenté, la Haute juridiction introduit une conception très restrictive du « lien fonctionnel ».
En effet, alors que la Cour administrative d’appel avait cru pouvoir faire application de ce principe s’agissant d’une éolienne et de son poste de livraison (CAA Bordeaux, 16 avril 2015, n°13BX0324), le Conseil d’Etat a censuré cette décision pour erreur de droit.
La Haute juridiction considère que la seule circonstance qu’il existe entre deux constructions éloignées l’une de l’autre, un lien technique et économique ne suffit pas à caractériser un ensemble immobilier unique, les projets de construction des éoliennes et du poste de livraison devant ainsi faire l’objet de demande d’autorisation d’urbanisme distinctes.
A rapprocher : CAA Bordeaux, 1er avril 2010, Ville de Bordeaux, n°09BX00275