Cass. com., 17 octobre 2018, n°17-17.635
La rétractation du jugement d’ouverture d’une procédure collective prive rétroactivement ce dernier de tous ses effets. Par voie de conséquence, elle met fin à l’arrêt du cours des intérêts résultant de plein droit du jugement d’ouverture.
En l’espèce, par un arrêt du 30 juin 2011, devenu irrévocable, une société a été condamnée à payer à une autre une certaine somme assortie d’intérêts contractuels. La société débitrice a été placée en procédure de sauvegarde par jugement du 18 juillet 2011 contre lequel la société créancière a formé une tierce opposition qui a été rejetée par un jugement du 7 novembre 2011.
Sur appel du créancier tiers-opposant, un arrêt du 24 janvier 2013, devenu irrévocable, a rétracté les dispositions du jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde en date du 18 juillet 2011.
Par jugement du 22 octobre 2013, le débiteur a été placé en redressement judiciaire. Le créancier a déclaré sa créance au passif de la procédure de redressement judiciaire, laquelle créance a été contestée au motif qu’elle incluait les intérêts échus entre le jugement de sauvegarde du 18 juillet 2011 et la signification de l’arrêt du 24 janvier 2013 rétractant ce jugement.
Par un arrêt du 16 mars 2017, la Cour d’appel de Caen a admis les intérêts de la créance au titre de la période couverte par la procédure de sauvegarde. Le débiteur a alors formé un pourvoi en cassation contre la décision de la Cour d’appel. Au soutien de son pourvoi, ce dernier prétendait que, dans l’hypothèse où la décision frappée de recours était exécutoire par l’effet de la loi, il était exclu que la partie qui bénéficiait de la décision puisse être redevable d’intérêts tant qu’il n’a pas été statué sur le recours, peu important que la décision faisant l’objet du recours soit ultérieurement anéantie.
Cette argumentation ne convainc guère. Par un arrêt du 17 octobre 2018, publié au bulletin, la Cour de cassation rejette le moyen en ces termes :
« La rétractation d’un jugement prive rétroactivement ce dernier de tous ses effets ; qu’ayant relevé que l’arrêt du 24 janvier 2013 avait rétracté le jugement du 18 juillet 2011 ouvrant la procédure de sauvegarde de la (société débitrice), la Cour d’appel en a exactement déduit que cette rétractation avait mis fin à l’arrêt du cours des intérêts résultant de plein droit du jugement d’ouverture, en application l’article L.622-28 du code de commerce, de sorte que la (société débitrice) ne pouvait bénéficier de l’arrêt du cours des intérêts contractuels à compter du jugement du 18 juillet 2011. »
La rétractation des dispositions du jugement d’ouverture d’une procédure collective est assimilée à la nullité. Par voie de conséquence, tous les effets de la procédure collective sont anéantis rétroactivement, et ce nonobstant le caractère exécutoire de la décision rétractée. C’est donc logiquement que la Cour de cassation a décidé que la rétractation avait mis fin rétroactivement à l’arrêt du cours des intérêts résultant de plein droit du jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde.
A rapprocher : L.622-28 du code de commerce