CA Paris, 11 septembre 2013, n°11/14380
En présence d’un savoir-faire de faibles technicité, spécificité, et originalité, il n’est pas établi que l’obligation (de non-réaffiliation) du contrat soit indispensable à la protection du savoir-faire transféré.
Ce qu’il faut retenir :
En présence d’un savoir-faire de faibles technicité, spécificité, et originalité, il n’est pas établi que l’obligation (de non-réaffiliation) du contrat soit indispensable à la protection du savoir-faire transféré.
Pour approfondir :
La question de la validité des clauses de non-réaffiliation est mouvante. L’arrêt commenté, qui apporte sa pierre à l’édifice jurisprudentiel en cours, avait à connaître d’une clause de non-réaffiliation ainsi rédigée :
« en outre, sauf accord exprès du Franchiseur, si la rupture du contrat est imputable au franchisé, celui-ci ne pourra s’affilier, adhérer ou participer, directement ou indirectement à une chaîne d’hôtels restaurants nationale ou internationale, française ou étrangère, ne pas en créer une lui-même ou encore représenter ou se lier à tout groupement, organisme, association, société concurrente du Franchiseur sur le territoire français, ou d’autres pays où il y aurait une ou des enseignes B… pendant une durée de six mois », le point de départ étant constitué par la date de dépôt de l’enseigne ».
Le franchisé, qui s’était affiliée à un réseau concurrent dans le délai susvisé, soutenait que cette clause était nulle, car trop générale dans l’espace, disproportionnée et non nécessaire à la protection d’un savoir-faire dont l’originalité n’est pas suffisante pour justifier une protection territoriale si étendue ; le franchisé faisait notamment valoir que « le nombre de clients nécessaire pour réaliser au moins le chiffre d’affaires en dessous duquel ne sont même pas couverts les frais d’exploitation et la cessation des paiements est fatale ne peut être atteint que si l’établissement est référencé par un groupement comme une chaîne, une association, un société de réservation à distance ».
La Cour d’appel de Paris rappelle que les clauses de non-affiliation peuvent être considérées comme inhérentes à la franchise dans la mesure où elles permettent d’assurer la protection du savoir-faire transmis qui ne doit profiter qu’aux membres du réseau et de laisser au franchiseur le temps de réinstaller un franchisé dans la zone d’exclusivité. Ce principe se trouve néanmoins tempéré dans la mesure où ces clauses doivent cependant rester proportionnées à l’objectif qu’elles poursuivent, à savoir permettre au franchiseur de communiquer aux franchisés son savoir-faire et leur apporter l’assistance voulue pour les mettre en mesure d’appliquer ses méthodes, sans risquer que ce savoir-faire et cette assistance profitent, ne serait-ce qu’indirectement, à des concurrents.
Considérant que s’agissant du savoir-faire protégé, il comprend, selon les dispositions de l’article 2.2 du contrat de franchise, « des directives pour l’entretien et la sécurité de l’hôtel et du restaurant, l’organisation et les méthodes de travail et de gestion au sein de l’hôtel restaurant et de la chaîne, les principes et moyens d’actions commerciales vis-à-vis de la clientèle au niveau général et local, la charge graphique et la mercuriale de référencement fournisseurs », ces éléments étant réunis sous forme de manuels actualisés périodiquement.
La Cour d’appel de Paris retient que eu égard à « la nature de ce savoir-faire de faibles technicité, spécificité, et originalité, il n’est aucunement établi que l’obligation (de non-réaffiliation) du contrat soit indispensable à la protection du savoir-faire transféré » et que « par son étendue et la généralité de ses termes, cette clause interdit en fait tout exercice par l’ex-franchisé d’un commerce analogue à celui qu’il exerçait en qualité de franchisé pendant six mois sur tout le territoire français et dans tout pays doté de franchisés B…, dans des conditions économiquement acceptables ; qu’elle a donc des effets restrictifs de concurrence et doit être annulée ».