Cass. civ. 3ème, 7 mars 2019, n°18-12.221
Le respect du principe du contradictoire imposé lors de la réception des travaux est respecté dès lors que les parties ont été valablement convoquées. La preuve de cette convocation peut résulter de l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé réception et du rapport d’émission d’une télécopie adressés en temps utile à la partie absente lors de la réception.
Des époux ont entrepris des travaux de rénovation, d’extension et de construction d’une maison. En leur qualité de maître de l’ouvrage, ils ont souscrit dans ce cadre une assurance dommages-ouvrage. La mission complète de maîtrise d’œuvre a été confiée à un architecte. Une entreprise a été chargée des lots de gros œuvres, charpente – couverture, étanchéité – cloisons, isolation – ferronnerie – carrelage – revêtements. Une seconde société a été chargée des missions de contrôle technique concernant la solidité des ouvrages et celle des ouvrages existants.
Le 27 juillet 2009, le maître de l’ouvrage a résilié le marché de travaux et a convoqué l’entreprise chargée des lots de gros œuvre afin qu’il soit procédé à un état des lieux valant procès-verbal de réception. La convocation, prévoyant une réunion le 31 juillet 2009, a été adressée :
- d’une part, par fax, qui selon le rapport d’émission de la télécopie a été reçu le 27 juillet 2009, soit quatre jours avant la date prévue en vue de la réception du chantier ;
- d’autre part, par l’envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, qui a été présentée la veille de la réunion prévue, et qui n’a finalement été remise à l’entreprise qu’une semaine plus tard.
Le 31 juillet 2009, un compte-rendu de visite a été établi, en l’absence de l’entreprise chargée des lots de gros œuvre. Le maître de l’ouvrage a adressé deux déclarations de sinistre à son assureur qui, après expertise, leur a versé la somme de 1 149 280 euros.
Par la suite, l’assureur du maître de l’ouvrage a assigné le maître d’œuvre, son assureur, l’assureur de l’entreprise chargée du gros œuvre et la société chargée des missions de contrôle technique en vue d’obtenir le paiement de cette somme. La cour d’appel a condamné in solidum les défendeurs à s’acquitter du paiement de la somme auprès de l’assureur du maître de l’ouvrage.
L’assureur de la société chargée du gros œuvre a formé un pourvoi en cassation aux termes duquel il reprochait à la cour d’appel de ne pas avoir pris en compte les conséquences de l’absence de convocation régulière de son assuré à la réception des travaux, ce qui, selon elle, portait atteinte au principe du contradictoire. L’assureur reprochait ainsi à la cour d’appel de s’être fondée uniquement sur le rapport d’émission de la télécopie pour caractériser le respect du principe du contradictoire, alors que cet élément ne pouvait suffire pour prouver que la convocation avait bien été transmise en intégralité à son destinataire.
La Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement et confirme la décision de la cour d’appel. La Haute juridiction considère que « [l’entreprise chargée du gros œuvre] avait été convoquée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception datée du 27 juillet 2009 et par une télécopie du même jour, qui a été adressée au numéro figurant sur les procès-verbaux des réunions de chantier et étant celui auquel avaient été adressées des télécopies [du maître d’œuvre] écrivant à l’entrepreneur pour lui notifier des erreurs d’exécution, et qui avait été reçues ». Dès lors, la Cour de cassation considère que la cour d’appel était bien fondée à retenir que la réception prononcée en présence du maître de l’ouvrage et du maître d’œuvre et alors que la société chargée du gros œuvre a été valablement convoquée, était contradictoire.
En statuant ainsi, la Cour de cassation inscrit sa décision dans une jurisprudence constante en vertu de laquelle la présence de l’entreprise lors de la réception n’est pas nécessaire pour caractériser le respect du principe du contradictoire, à condition que celle-ci ait été valablement convoquée (Cass. civ. 3ème, 3 juin 2015, n°14-17.744).
A rapprocher : Cass. civ. 3ème, 3 juin 2015, n°14-17.744