Cass. civ. 3ème, 11 avril 2019, n°18-16.061
La transaction qui ne comporte aucune mention relative au dépôt de garantie versé par le preneur à la conclusion du bail, ne règle pas le sort de celui-ci après libération des lieux, de sorte que le preneur pouvait déduire du montant de l’indemnité transactionnelle versée au bailleur au titre de la transaction, le montant dudit dépôt de garantie.
Ce qu’il faut retenir :
Les transactions se renferment dans leur objet et la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s’entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ; il en résulte que la transaction qui ne comporte aucune mention relative au dépôt de garantie versé par le preneur à la conclusion du bail, ne règle pas le sort de celui-ci après libération des lieux, de sorte que le preneur pouvait déduire du montant de l’indemnité transactionnelle versée au bailleur au titre de la transaction, le montant dudit dépôt de garantie.
Pour approfondir :
Dans cette affaire, un bailleur et un locataire ont souhaité mettre un terme au contrat de bail commercial qui les liait et ont à cet effet conclu un protocole transactionnel destiné à éteindre le différend qui pourrait en résulter entre elles, moyennant le versement d’une indemnité par le preneur. Ce dernier a cependant déduit de l’indemnité transactionnelle prévue, le montant du dépôt de garantie versé lors de la conclusion du bail ; le bailleur, estimant que le sort du dépôt de garantie n’entrait pas dans l’objet de la transaction, de sorte qu’il lui restait acquis, a assigné le preneur en paiement.
La cour d’appel a fait droit à la demande du bailleur ; à cet effet, la cour a jugé que le sort du dépôt de garantie n’étant pas expressément spécifié dans la transaction, il n’en est pas exclu et reste acquis au bailleur, l’indemnité au versement de laquelle la société a irrévocablement consenti devant s’entendre sans déduction de la moindre somme en raison de l’exécution du bail.
La Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt d’appel ; la Haute juridiction a estimé qu’en statuant ainsi, « après avoir relevé que la transaction litigieuse ne contenait aucune mention relative au dépôt de garantie, ce dont il résultait qu’elle n’en réglait pas le sort après libération des lieux », la Cour a violé l’article 2048 du Code civil aux termes duquel « les transactions se renferment dans leur objet, que la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s’entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ».
Cet arrêt est intéressant en ce qu’il revient sur l’objet de la transaction dont la Cour de cassation rappelle qu’il doit être interprété strictement.
Pour mémoire, au sens de l’article 2044 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties décident, moyennant des concessions réciproques, de mettre un terme à une contestation née ou de prévenir une contestation à naître. L’objet de la transaction et son champ sont ensuite encadrés par les dispositions des articles 2048 visé par la Cour de cassation dans son arrêt et 2049 du Code civil lequel précise quant à lui que « les transactions ne règlent que les différends qui s’y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l’on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé. »
Les dispositions relatives à la transaction sont donc claires et circonscrivent l’objet de la transaction à ce qui y est expressément prévu, ainsi que le rappelle la Haute juridiction dans le présent arrêt ; les renonciations faites par les parties dans le cadre de la transaction ne portent que sur le différend objet ; il incombe ainsi aux parties à la transaction d’être vigilantes au moment de la rédaction de cette dernière et de délimiter avec précaution l’objet de cette dernière ; à défaut, elles s’exposent, comme c’est le cas dans le présent arrêt, à ce que leur revendication se trouvant exclu du champ de la transaction et demeure donc recevable.
A rapprocher : Cass. com., 29 mai 2001, n°98-19.058