CA Paris, 19 mai 2021, n°16/16055
La nullité du contrat de franchise pour erreur déterminante suppose la démonstration par le franchisé que les informations précontractuelles manquantes et/ou erronées ont vicié son consentement.
Le 27 avril 2009, M. Z reçoit un DIP de la part de la société FV, à la tête d’un réseau de restauration rapide. Un contrat de franchise est signé le 17 novembre 2010 entre la société franchisée G. et la société FV. Dès le premier exercice, la société franchisée connait une perte d’exploitation qui perdure et, en février 2014, elle est finalement placée en procédure de liquidation judiciaire.
Le liquidateur de la société franchisée et M. Z. assignent le franchiseur aux fins d’obtenir notamment la nullité du contrat de franchise. En première instance, le tribunal ne fait pas droit à ces demandes. Un appel est interjeté.
Devant la cour d’appel, M. Z. soutient que le franchiseur n’aurait pas remis de DIP contenant les informations prévues par la loi, notamment en ce qui concerne l’état du marché local et les perspectives de développement, n’aurait donné aucune information sur le manque de rentabilité du concept au sein du réseau, et de ce fait, n’aurait pas permis à M. Z. de s’engager en connaissance de cause ; le franchiseur aurait également validé des comptes prévisionnels ne correspondant pas à la réalité du concept et du réseau. Le franchiseur oppose le fait que le franchisé a lui-même réalisé sa propre étude d’implantation et ses prévisionnels, sur lesquels il aurait émis des réserves et que les demandeurs ne précisent pas quelles seraient les informations qui auraient fait défaut ou qui auraient été inexactes ; le franchiseur soutient que les informations communiquées dans le cadre du DIP étaient vérifiables et fiables.
Les juges du fond rappellent que le manquement à l’obligation d’information précontractuelle prévue à l’article L.330-3 du Code de commerce entraine la nullité du contrat de franchise que si ce manquement a eu pour effet de vicier le consentement du franchisé. Il est également rappelé que l’article L.330-3 du Code de commerce met à la charge du franchiseur l’obligation de présenter « un état et les perspectives de développement du marché concerné » et que l’article R.330-1 du Code de commerce l’oblige notamment à « une présentation de l’état général et local du marché des produits ou services devant faire l’objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché ». En revanche, la loi ne met pas à la charge du franchiseur l’obligation de remettre une étude du marché local ; il appartient en effet au franchisé de procéder lui-même à une analyse d’implantation afin d’apprécier le potentiel et, par là-même la viabilité du fonds qu’il envisage de créer.
En l’espèce, il est constaté que le franchiseur a remis au candidat un DIP comportant : un historique, la présentation des dirigeants, une revue de presse, la présentation du réseau, les résultats du franchiseur, l’état général du marché, et un projet de contrat.
Les juges du fond relèvent cependant que les appelants se contentent d’indiquer que le franchiseur aurait été défaillant dans la remise d’un état du marché local et des perspectives de développement, mais sans expliquer en quoi cette abstention aurait vicié son consentement.
Ainsi, si le candidat a lui-même réalisé l’état du marché local à partir d’une méthodologie transmise par le franchiseur, il ne démontre pas en quoi cet état serait défaillant du fait de l’absence de prise en compte d’une information essentielle que le franchiseur se serait sciemment abstenu de communiquer et/ou de la prise en compte de données erronées fournies par le franchiseur qui l’aurait ainsi induit en erreur. Les appelants n’établissent pas non plus en quoi l’absence d’informations sur les perspectives de développement du marché aurait provoqué une erreur qui aurait été déterminante de leur consentement.
S’agissant des difficultés rencontrées par certains franchisés et dont le franchiseur n’aurait pas informé le candidat : il n’est aucunement démontré que lors de la remise du DIP et de la signature du contrat de franchise, le franchiseur connaissait de telles difficultés significatives nécessitant une information particulière, voire une mise en garde, du franchiseur.
Enfin, s’agissant des informations relatives au montant des dépenses et investissements spécifiques au réseau, celles-ci ont été communiquées au candidat et il n’est pas démontré en quoi ces informations auraient été insuffisantes ou trompeuses pour l’établissement de ses prévisionnels par le candidat.
Ainsi, les juges du fond ont considéré que les appelants échouaient dans la démonstration de l’existence d’une erreur déterminante ayant pu vicier leur consentement et en conséquence la demande de nullité du contrat a été rejetée.
A rapprocher : Articles L.330-3 et R.330-1 du Code de commerce