La proportionnalité de la clause aux intérêts légitimes du franchiseur est bien une condition de validité de la clause de non-réaffiliation et fait l’objet d’une appréciation au cas par cas.
La question de la validité des clauses de non-réaffiliation fait régulièrement l’objet de précisions en jurisprudence.
Ainsi, la chambre commerciale de la Cour de cassation a rappelé dans son arrêt du 28 septembre 2010 (Bull. civ. IV, n°145) que les clauses de non-concurrence et de non-réaffiliation ne pouvaient être assimilées. La Haute juridiction a ainsi énoncé que « la clause de non-concurrence a pour objet de limiter l’exercice par le franchisé d’une activité similaire ou analogue à celle du réseau qu’il quitte, tandis que la clause de non-réaffiliation se borne à restreindre sa liberté d’affiliation à un autre réseau ». Etait par conséquent cassé l’arrêt de la cour d’appel, qui avait jugé que, dans l’espèce considérée, la clause de non-réaffiliation s’analysait en une clause de non-concurrence.
Cette décision mettait un frein au courant jurisprudentiel assimilant les clauses de non-réaffiliation aux clauses de non-concurrence lorsque l’activité franchisée s’inscrivait dans un secteur où il était, de fait, presque impossible d’exercer sans enseigne notoire. Etait principalement concerné par ce courant le secteur de la distribution alimentaire de proximité.
Si l’arrêt du 28 septembre 2010 a confirmé la différence de nature des clauses de non-concurrence et de non-réaffiliation, il semblait demeurer que, à l’instar de la validité des clauses de non-concurrence, celle des clauses de non-réaffiliation est appréciée au regard des conditions de limitation dans le temps et dans l’espace et de proportionnalité à l’intérêt protégé.
Or, l’incidence de la clause de non-réaffiliation dans le secteur considéré est nécessairement cruciale dans l’appréciation de la proportionnalité de ladite clause. C’est ce que vient de confirmer la décision commentée qui ne manquera pas d’attirer l’attention du lecteur.
En l’espèce, le contrat de franchise comprenait une clause par laquelle les franchisés s’engageaient, en cas de rupture anticipée du contrat, à ne pas utiliser, pendant une période d’un an à compter de sa résiliation, une enseigne de renommée nationale ou régionale, déposée ou non, et à ne pas offrir en vente des marchandises dont les marques sont liées à ces enseignes dans un rayon de cinq kilomètres du magasin.
Les franchisés ayant invoqué la nullité de la clause de non-réaffiliation qui leur était opposée, la cour d’appel a annulé ladite clause en raison de son caractère disproportionné par rapport aux intérêts légitimes du franchiseur, eu égard au secteur d’activité considéré. Les juges du fond ont en effet relevé que l’activité de distribution alimentaire de proximité s’exerce de manière quasi systématique dans le cadre de réseaux de franchise organisés, avec des enseignes de renommée nationale ou régionale et que la supérette des franchisés était exploitée dans un petit chef-lieu de canton. La cour d’appel en a déduit que la clause précitée, qui mettait les ex-franchisés, privés dans leur secteur d’activité du support d’un réseau structuré d’approvisionnement, dans l’impossibilité de poursuivre, dans des conditions économiquement rentables, l’exploitation de leur fonds de commerce, n’était pas proportionnée aux intérêts légitimes du franchiseur.
Le franchiseur a formé un pourvoi à l’encontre de cette décision, en soutenant notamment que la clause de non-réaffiliation n’était pas soumise à des conditions de validité identiques à celles des clauses de non-concurrence, et n’était, en particulier, pas soumise « aux conditions de nécessité et de proportionnalité propres à la clause de non-concurrence ».
La Cour de cassation a néanmoins rejeté le pourvoi et considéré que la Cour d’appel avait pu déduire de ses constatations que la clause de non-réaffiliation n’était pas proportionnée aux intérêts légitimes du franchiseur et devait être annulée.
Ainsi, la proportionnalité de la clause aux intérêts légitimes du franchiseur est bien une condition de validité de la clause de non-réaffiliation. Cette proportionnalité fait en principe l’objet d’une appréciation au cas par cas mais sera plus difficile à démontrer dans les secteurs où l’activité s’exerce quasi systématiquement sous une enseigne de renommée nationale ou régionale.