L’usage d’un signe à titre d’enseigne et dans une adresse internet ne constitue pas un usage pour désigner des produits et services et, par conséquent, ne permet pas d’échapper à la déchéance.
Selon l’article L.714-5 du code de la propriété intellectuelle, le titulaire de la marque encourt la déchéance de ses droits lorsqu’il n’en fait pas un usage sérieux pendant une période ininterrompue de cinq ans précédent la demande de déchéance. La décision commentée nous permet de revenir sur les conditions de l’usage sérieux attendu du titulaire de la marque pour le maintien de ses droits.
Dans cette affaire, une société exploitait depuis plusieurs années un signe, apposé sur ses produits (des chaussures), pour désigner son point de vente. Elle assignait en déchéance de marques la société qui avait procédé au dépôt de ce même signe, seul et accompagné des termes « chausseur » et « chaussures » ; parallèlement elle était assignée en concurrence déloyale, et les deux procédures étaient jointes. La cour d’appel rejetait la demande de déchéance en considérant qu’un usage des marques était justifié dans les mois précédant la demande de déchéance, notamment à titre d’enseigne et dans une adresse internet, et faisait interdiction d’usage de ce signe (appréciation censurée dans cet arrêt mais sur laquelle nous ne reviendrons pas dans ce commentaire).
Rappelant, au visa de l’article L.714-5 du CPI, qu’une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, la Haute juridiction casse l’arrêt. En effet, les juges du fond avaient retenu l’usage sérieux sur la base de l’usage des signes à titre d’enseigne et dans une adresse internet. Or, selon la Cour de cassation, cela ne constituait pas un usage pour désigner des produits et services, c’est-à-dire un usage à titre de marque et, par conséquent, il ne permettait pas d’échapper à la déchéance.
En outre, la Cour de cassation considère que les juges du second degré n’ont pas porté une appréciation sur chacune des marques visées par la demande de déchéance, pour constater que chacun de ces signes avait fait l’objet d’un usage ininterrompu pendant une période de cinq années avant ladite demande. C’est ici l’occasion de rappeler que tout usage n’est pas de nature à permettre le maintien des droits sur la marque : il doit s’agir d’un usage à titre de marque, ce qui implique qu’elle soit utilisée pour désigner les produits et services commercialisés.