La modification de l’enseigne par le franchiseur, le défaut de détermination d’un territoire d’exclusivité et de signature du contrat ne permettent pas pour autant au franchisé de se soustraire à ses obligations contractuelles.
L’arrêt commenté présente l’intérêt de se prononcer en faveur des têtes de réseaux sur plusieurs situations pourtant très problématiques, directement liées à la rédaction du contrat de franchise.
En l’espèce, la société International Esthétique, franchiseur d’un concept d’instituts de beauté sous l’enseigne « Epil Center », a conclu quatre contrats de franchise avec une première société.
Quelques temps après, elle informe les membres de son réseau du changement de dénomination de l’enseigne, celle-ci devenant « Esthétic Center ».
Par la suite, le dirigeant de la société franchisée ayant créé une autre société afin d’exploiter d’autres instituts sous la nouvelle enseigne, le franchiseur signe avec cette nouvelle société un cinquième contrat de franchise. Enfin, cette seconde société du franchisé ouvre un sixième institut sous la nouvelle enseigne, sans toutefois retourner le contrat signé au franchiseur.
Suite à des difficultés rencontrées lors de la mise en conformité de ses premiers instituts à la nouvelle enseigne, le franchisé résilie l’ensemble de ses contrats de franchise « Epil Center » et annonce qu’il cesse d’utiliser la marque « Esthétic Center » pour ses autres instituts.
C’est dans ces circonstances que la société International Esthétique a assigné les sociétés franchisées.
Les premiers juges n’ont, qu’en partie, fait droit à ses prétentions puisque, si les sociétés franchisées ont été solidairement condamnées pour résiliation des contrats « Esthétic Center » et pour violation de la clause de non-concurrence post-contractuelle (leur demande d’annulation des contrats ayant au préalable été rejetée), la société franchiseur a elle été reconnue coupable de résiliation fautive des contrats de franchise « Epil Center ».
Les sociétés franchisées ont alors fait appel de cette décision. L’arrêt rendu le 5 février 2014 par la Cour d’appel de Paris se prononce donc sur plusieurs points que l’on analysera successivement.
Sur le défaut de contrat de franchise signé : la Cour rappelle que le contrat de franchise se prouve par tout moyen et donc qu’il importe peu de pouvoir constater l’existence d’un contrat écrit et signé par le franchisé dès lors que le franchisé a exploité son institut sous l’enseigne du franchiseur, « ce qui traduit l’existence d’un contrat de franchise dans les termes et conditions précisés dans la proposition écrite de contrat qui lui avait été adressée ».
Sur l’absence de zone territoriale définie dans le contrat : contrairement aux dires des franchisés soutenant que le défaut de détermination d’une zone géographique dans l’annexe qui devait être remise au franchiseur entraînait l’indétermination de l’objet du contrat et donc sa nullité, la Cour juge que l’exclusivité territoriale n’est pas un des éléments constitutifs du contrat de franchise.
Sur la clause de non-concurrence : confirmant encore et toujours les critères de validité des clauses de non-concurrence, la Cour relève que la clause litigieuse, interdisant aux anciens franchisés de créer un réseau concurrent dans l’année qui suit la cessation du contrat et dans les lieux où la marque était implantée, est une clause limitée dans le temps et dans l’espace et est parfaitement proportionnée au regard du but recherché de protection du réseau.
Sur la modification par le franchiseur de son enseigne en cours de contrat : invoquant la modification de l’objet même du contrat « Epil Center » et la nécessité d’un avenant au contrat, la société franchisée prétextait que le changement d’enseigne, entraînant par là même le délaissement de celle-ci par le franchiseur, justifiait que les contrats de franchise soient résiliés aux torts de la tête de réseau.
Pourtant, la Cour considère qu’il s’agit là d’une évolution du savoir-faire de nature à augmenter le chiffre d’affaires des franchisés et que, les modifications étant proposées par le franchiseur dans des conditions de délai et de prix raisonnables, le franchisé est mal fondé à soutenir que l’objet du contrat initial en était modifié.
En outre, le franchisé est, pour la Cour, tout aussi mal fondé à exiger du franchiseur d’autres efforts concernant l’enseigne « Epil Center » alors qu’il avait continué à faire la promotion de cette enseigne, enseigne que la quasi-totalité des autres franchisés avaient d’ailleurs abandonné au profit de la nouvelle.