Le 26 février dernier, le Parlement européen a adopté le projet de nouvelle directive « Tabac ». L’article 18 concerne notamment les cigarettes électroniques.
Adopté le 26 février par 514 voix pour et 66 voix contre, le projet de Directive du Parlement européen s’apprête à bousculer le secteur de la distribution des cigarettes électroniques.
La nouvelle proposition de Directive de la Commission vise à réformer la Directive 2001/37/CE du Parlement et du Conseil adoptée le 5 juin 2001. Elle tend, conformément à l’article 114 du TFUE, à assurer un niveau élevé de protection de la santé.
La révision de la Directive est axée sur 5 domaines :
- les produits de tabac sans combustion ;
- le conditionnement et l’étiquetage ;
- les ingrédients et additifs ;
- les ventes à distance transfrontalières ;
- les éléments de traçabilité et de sécurité.
L’objectif initial du projet est donc principalement concentré sur le tabac.
On s’étonne alors de voir inséré dans la Directive un Titre III sur les « Produits autres que ceux du tabac ». C’est dans ce Titre III qu’est traitée la question des Produits Contenant de la Nicotine (PCN), au premier rang desquels la désormais courante cigarette électronique.
L’article 2 du projet de Directive définit en effet le Produit Contenant de la Nicotine comme « un produit pouvant être utilisé par les consommateurs à des fins de consommation par inhalation, par ingestion ou sous d’autres formes, la nicotine étant soit ajoutée au cours du processus de fabrication, soit administrée par l’utilisateur avant ou pendant la consommation ».
En octobre 2013, les députés européens s’étaient prononcés contre l’assimilation de la cigarette électronique au médicament. Le nouveau projet de Directive semble alors opter pour l’extrême inverse en considérant la cigarette électronique comme un produit assimilable au tabac.
L’article 18 du projet de Directive prévoit ainsi l’autorisation préalable à la mise sur le marché des produits contenant 2 mg de nicotine par unité ou 4 mg de nicotine par ml, ou encore les produits dont l’usage prévu entraînent une concentration plasmatique maximale moyenne supérieure à 4 mg de nicotine par ml. Cette autorisation de mise sur le marché interviendrait conformément à la Directive 2001/83/CE.
La commercialisation serait subordonnée à un message d’avertissement sur l’emballage « ce produit contient de la nicotine et peut nuire à la santé ».
La cigarette électronique devient donc, de manière très paradoxale, un produit assimilé à du tabac. Car si le principe de précaution peut s’expliquer par une incertitude scientifique de nature à justifier une abstention, une restriction, une régulation ou une interdiction, il est bien une chose certaine en matière de cigarette électronique : ce n’est pas du tabac. L’assimilation de la cigarette électronique à un dérivé du tabac peut largement apparaître comme un non-sens. De l’aveu même de la Commission, cette nouvelle proposition de Directive a pour but de répondre au constat que le tabagisme est la première cause de décès prématuré dans l’Union. Or, la cigarette électronique n’est pas une cause de décès prématuré.
Si le vœu d’assurer un niveau élevé de protection de la santé est assurément un principe découlant du Traité, il est difficile de ne pas voir dans ce projet les répercussions en termes de concurrence, notamment concernant le marché français. Raisonner de façon binaire entre médicament et tabac revient finalement à attribuer la cigarette électronique soit au monopole des pharmaciens, soit au monopole des buralistes. C’est encore nier une vérité scientifique élémentaire. Un produit peut contenir de la nicotine sans être du tabac et sans être un médicament.
L’entrée en vigueur de la Directive est prévue pour le mois de mai 2014 et le projet prévoit un délai de transposition de deux ans. L’horizon 2016 constitue donc un enjeu crucial pour le secteur de la cigarette électronique. De par les deux monopoles précités, nul doute que la transposition en France ne se fera pas sans heurt. Il est en effet difficilement envisageable que les discussions à l’échelle nationale ne viennent pas à dériver bien au-delà des considérations sanitaires, pour déborder sur la condition économique des débitants de tabac. Rappelons toutefois que la justification avancée du projet de Directive tient dans les incertitudes entourant les conséquences sanitaires du vapotage.
Cela laisse donc 2 ans pour préciser nos connaissances sur le domaine, ou encore inventer de nouveaux procédés de vapotage. D’ici 2016, les termes du débat peuvent donc changer.