Le faible prix de cession d’un fichier clientèle retenu par le juge-commissaire constitue un prix réel, dès lors qu’il se trouve justifié par l’absence de garantie sur la consistance dudit fichier.
L’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire entraîne la réalisation du patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée de son patrimoine en vue de permettre un apurement – au moins partiel – du passif existant. Dans cette perspective, le juge-commissaire peut notamment autoriser la vente de gré à gré de certains des biens du débiteur « aux prix et conditions qu’il détermine » (art. L. 642-19 du Code de commerce).
C’est dans ce cadre que s’inscrit l’arrêt présentement commenté. En l’espèce, le débiteur, placé en procédure de liquidation judiciaire, entendait contester la décision du juge ayant autorisé la vente de gré à gré de son fichier clientèle à un prix qu’il jugeait largement inférieur à sa valeur marchande. Ce prix proposé par un concurrent du débiteur avait été retenu par le juge compte tenu de la carence du débiteur dans son obligation légale de tenue d’un ensemble de documents, faute de quoi, aucune garantie, ne serait-ce que sur la consistance même du fichier
clientèle, ne pouvait être fournie à un quelconque cessionnaire. Confirmant l’arrêt d’appel, la Haute juridiction rejette le pourvoi. Rappelant que « le juge-commissaire détermine les conditions de la vente des biens qu’il autorise et son prix, lequel doit être réel », la Cour considère qu’en l’espèce, le prix était justifié au regard des éléments factuels soumis à l’appréciation du juge-commissaire et notamment de l’absence de garantie sur la consistance du fichier clientèle.
En ayant recours à la notion de prix réel, la Chambre commerciale fait sienne l’interprétation jurisprudentielle classique de la notion de prix retenue en matière de vente de droit commun, pour la voir appliquée au droit des entreprises en difficulté ; appropriation qu’elle avait amorcée dès 2004 (Cass. com., 28 septembre 2004, pourvoi n°02.11-210). Cette décision vient ainsi préciser le contour des éléments permettant d’apprécier le prix retenu en matière de cession de gré à gré dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire.