La Cour d’appel de Paris a compétence exclusive pour trancher les contredits de compétence formés contre les décisions des juridictions spécialisées. Toutefois, le contredit transmis à une Cour incompétente ne le rend pas irrecevable.
Ce n’est plus une nouveauté : l’article D.442-3 du Code de commerce donne compétence exclusive à huit tribunaux de première instance pour statuer sur l’application de l’article L.442-6 du Code de commerce. La Cour d’appel de Paris est la seule Cour compétente pour statuer en appel sur les décisions de ces juridictions spécialisées. Par un arrêt du 4 novembre 2014, la Cour a encore renforcé cette compétence exclusive en réservant à la Cour d’appel de Paris la compétence pour statuer sur le contredit de compétence. Dans cette affaire, une société française avait assigné quatre sociétés de droit étranger pour cause de rupture brutale d’une relation commerciale établie. Le Tribunal de commerce de Lyon s’est déclaré incompétent au profit des juridictions suédoises. Le demandeur a alors formé un contredit au secrétariat du greffe du Tribunal de commerce. La Cour d’appel de Lyon, à qui le contredit a été transmis, l’a déclaré irrecevable, car le Tribunal de commerce de Lyon avait statué en tant que juridiction spécialisée, et donc que le contredit devait être tranché par la Cour d’appel de Paris. La Cour de cassation approuve partiellement cette décision, en reconnaissant la compétence de la Cour d’appel de Paris. La lettre de l’article D.442-3 du Code de commerce énonce la compétence de la Cour de Paris « pour connaître des décisions rendues par ces juridictions ». Il n’y a donc pas lieu de distinguer entre les décisions sur la compétence et les décisions au fond, et il est exact que la Cour d’appel de Paris a compétence exclusive pour trancher les contredits de compétence à propos des décisions rendues par les juridictions spécialisées. En revanche, la Cour de cassation exclut que la sanction soit l’irrecevabilité du contredit. En effet, en application des articles 82 et 83 du CPC, le contredit s’exerce en le déposant au secrétariat du greffe de la juridiction qui a rendu la décision critiquée, ici le Tribunal de commerce de Lyon. Il appartient à cette juridiction de transmettre le contredit à la juridiction compétente pour en connaître. La Cour d’appel de Lyon devait donc retourner le dossier au Tribunal de commerce de Lyon, en lui indiquant de le transmettre à la Cour d’appel de Paris. On ne peut pas sanctionner par une irrecevabilité une carence qui est imputable au greffe de la juridiction de première instance.