L’ancien dirigeant de la personne morale débitrice peut valablement présenter une offre d’acquisition de l’entreprise, sauf en cas de fraude.
Ni le débiteur, ni les dirigeants de droit ou de fait de la personne morale débitrice, ni les proches parents, ne sont admis directement ou par personne interposée, à présenter une offre d’acquisition d’une entreprise en redressement judiciaire (art. L.642-3 et L.631-22 combinés du C. com.). Selon la Cour de Cassation, il ne résulte pas de ces dispositions que l’ancien dirigeant de droit serait frappé d’une interdiction de présenter une offre d’acquisition, sauf en cas de fraude.
En l’espèce, le gérant d’une SARL avait été poursuivi pour infraction à la législation sur les jeux de hasard et mis sous contrôle judiciaire avec interdiction de diriger. Il a été remplacé par un autre gérant, lequel a déclaré la cessation des paiements peu de temps après. Suite à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, l’ancien dirigeant a présenté une offre de reprise. Le Tribunal a déclaré cette offre irrecevable et prononcé la liquidation judiciaire de la SARL.
La Cour d’appel a confirmé le jugement, considérant que l’ancien dirigeant de droit n’avait pas choisi délibérément de mettre fin à ses fonctions, et qu’il avait par ailleurs qualité de dirigeant de fait. La Cour de cassation a cependant interprété strictement la règle n’écartant que les dirigeants de droit ou de fait : l’ancien dirigeant de droit peut valablement présenter une offre, sa qualité de dirigeant de fait n’étant en outre pas démontrée.
La Haute Juridiction a introduit cependant une exception de fraude. L’interprétation stricte de la règle d’interdiction paraissant nécessaire en raison de son caractère restrictif de liberté, mais ne devant pas conduire à contourner la règle trop aisément. Le dirigeant de droit pouvant démissionner avant l’ouverture de la procédure collective, afin de présenter ensuite une offre de reprise. En l’espèce, la Cour de cassation a retenu que l’existence d’une fraude n’avait pas été relevée.
Cette décision justifiée en droit peut cependant paraitre étonnante sur un plan moral. L’ancien dirigeant n’a certes, pas démissionné pour des raisons stratégiques, mais a été remplacé pour des faits délictueux quelques semaines avant la déclaration de cessation des paiements.