Cass. com., 10 mars 2015, pourvoi n°12-15.505
Le défaut d’apport de fonds suffisants à la société lors de sa constitution n’est pas une faute de gestion de nature à engager la responsabilité de l’associé gérant pour insuffisance d’actif.
Lorsque la procédure de liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut décider, en application des dispositions de l’article L.651-2 du Code de commerce, que le montant de cette insuffisance sera supporté, intégralement ou partiellement, par tout ou partie des dirigeants de droit ou de fait, qui auraient commis une ou plusieurs fautes de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif.
La Cour de cassation fait une stricte application du texte en censurant toute décision des juges du fond qui ne caractérisaient précisément pas la nature de la faute reprochée (v. en ce sens Cass. com., 28 mai 1991, n°89-21.116). Cette faute ne peut être qu’une faute relative à la gestion de la société.
En l’espèce, une société avait été constituée entre deux associés, dont l’un des deux occupait la fonction de dirigeant. Postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire de cette société, le liquidateur a notamment assigné l’associé gérant en responsabilité pour insuffisance d’actif. La Cour d’appel a fait droit à la demande du liquidateur en retenant que cet associé gérant avait commis une faute de gestion en n’apportant pas à la société qu’il avait créée, des fonds suffisants de nature à assurer son fonctionnement.
La Cour de cassation casse cet arrêt pour violation des dispositions de l’article L.651-2 du Code de commerce. La Haute juridiction rappelle que l’insuffisance des apports consentis à une société lors de sa constitution est imputable à l’associé en cette seule qualité et ne peut dès lors constituer une faute rattachable à la gestion de la société.
Cette décision ne peut être que saluée. En effet, si l’insuffisante dotation en fonds de la société peut être fautive, il ne s’agit – en tout état de cause – que d’une faute commise dans l’exécution des obligations incombant aux associés dans le cadre de leur contrat de société (c. civ. art. 1832) indépendamment de leurs éventuels mandats de gestion.
Dans la lignée de sa jurisprudence constante et ancienne, la Cour de cassation réaffirme au travers de cet arrêt la nécessité d’une interprétation stricte de la lettre du texte. Si, seule la faute dument identifiée est de nature à engager la responsabilité d’un dirigeant pour insuffisance d’actif, encore faut-il qu’il s’agisse bien d’une faute de gestion.