Cass. soc, 22 septembre 2015, pourvoi n°13-18.803
L’absence de liberté de création s’oppose à la reconnaissance de droits d’auteur à une personne physique au profit de la qualification d’œuvre collective au bénéfice de la personne morale à l’initiative de la création qui en supervise la réalisation et en assure la diffusion.
Ce qu’il faut retenir : L’absence de liberté de création s’oppose à la reconnaissance de droits d’auteur à une personne physique au profit de la qualification d’œuvre collective au bénéfice de la personne morale à l’initiative de la création qui en supervise la réalisation et en assure la diffusion.
Pour approfondir : Le conflit opposant l’ancien salarié à son employeur est l’un des terrains privilégiés de développement de la notion d’œuvre collective. Ce type d’œuvre est envisagé par l’article L 113-2 du CPI lequel la définit ainsi à l’alinéa 3 : « Est dite collective l’œuvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé ». En présence d’une œuvre dite collective, les droits d’auteur naissent sur la tête de la personne morale qui a initié la création, en a supervisé la réalisation et l’a diffusé publiquement, sans qu’il soit besoin d’établir la cession des droits d’auteur à son bénéfice. C’est tout l’enjeu d’une telle qualification.
Dans cette affaire, une ancienne salariée de Lalique successivement styliste, chef du service création, puis directrice artistique revendiquait la qualité d’auteur et la titularité des droits sur un certain nombre d’œuvres et assigna en contrefaçon son ancien employeur. La Cour d’appel, approuvée par la Haute Cour, a qualifié l’ensemble des œuvres revendiquées d’œuvres collectives sur lesquelles l’ancienne salariée ne pouvait donc revendiquer des droits d’auteur la rendant, par conséquent, irrecevable en son action en contrefaçon.
La Haute Cour retient que cette qualification avait justement été retenue par les juges du fond lesquels avaient établi que le Président de la société avait l’initiative des recherches de nouveaux produits et assurait la direction des études esthétiques, industrielles ou commerciales ; que son successeur précisera ensuite à la salariée qu’elle devait créer des produits dans le respect de l’image et de la stratégie définies par la direction générale.
En outre, une autre salariée dessinait les pièces maîtresse des collections et en fixait les thèmes à partir de ses carnets de voyages et dont le bureau de créations s’inspirait pour compléter les collections, chaque dessin étant soumis à l’approbation de la direction générale. Elle recevait également de la direction générale des instructions esthétiques.
Enfin, les œuvres en cause qui consistaient en des modèles en trois dimensions, ont été conçues par différentes personnes et en particulier avec la participation de différents corps de métier dont l’intervention allait au-delà de la simple exécution.
Aussi, l’ancienne salariée n’a pas été en mesure d’établir qu’elle disposait de droits d’auteur dès lors qu’elle ne définissait pas les choix esthétiques de l’entreprise et ne jouissait pas d’une liberté de création.
On retiendra que la liberté de création est l’un des critères déterminant pour retenir la qualification d’œuvre collective.
A rapprocher : article L.113-2 du Code de la propriété intellectuelle