Etude – Janvier 2010
Tout franchiseur peut envisager le recours à la franchise participative, qui consiste à prendre une participation dans le capital de certains de ses franchisés. Elle est généralement envisagée lorsque les franchisés ne disposent pas des fonds nécessaire au démarrage de leur activité. Tour d’horizon et écueils à éviter.
La franchise participative : Tour d’horizon
(Etude – Janvier 2010)
Tout franchiseur peut envisager le recours à la franchise participative, qui consiste à prendre une participation dans le capital de certains de ses franchisés. La franchise participative, à laquelle quelques franchiseurs ont recours, fait l’objet d’un important débat. Elle est généralement envisagée lorsque les franchisés ne disposent pas des fonds nécessaire au démarrage de leur activité. En dehors de cette hypothèse, les franchisés sont souvent assez réticents à l’égard de la franchise participative en raison de la perte d’autonomie qu’elle semble impliquer pour eux pendant et/ou après la relation de franchise. De même, les franchiseurs doivent être prudents s’ils souhaitent entrer au capital de leurs franchisés, une telle immixtion du franchiseur entraînant des risques quant à la limitation de l’indépendance du franchisé, et même dans certaines hypothèses quant à l’existence d’une concentration qui nécessitera alors une notification de l’opération aux autorités de la concurrence. Avant d’étudier ces deux points, il convient préalablement d’analyser l’intérêt pratique pour le franchiseur de procéder à une telle prise de participation au capital de son franchisé.
1. L’INTERET PRATIQUE D’UNE PRISE DE PARTICIPATION POUR LE FRANCHISEUR
Deux cas de figure sont envisageables : soit le franchiseur prend une participation faible au capital de son franchisé, soit il détient une part importante du capital de son franchisé.
• En cas de prise de participation faible
₋ si aucun droit spécifique n’est attaché à la prise de participation du franchiseur, celle-ci n’a pas d’intérêt réel en pratique, car elle ne lui permet pas de bénéficier d’une minorité de blocage, ni d’influencer les décisions du franchisé ;
₋ si elle fournit au franchiseur des droits plus importants que ceux qui devraient lui être octroyés en considération de sa participation au capital, elle revêt alors un intérêt certain pour le franchiseur qui aura peu investi dans l’entreprise du franchisé mais pourra néanmoins être consulté pour certaines décisions-clés. Néanmoins, ainsi que cela sera étudié ultérieurement, une telle déconnexion entre la participation au capital et les droits accordés peut constituer un indice d’une influence déterminante du franchiseur sur le franchisé, et entraîner sous certaines conditions la qualification de concentration. Le franchiseur devra alors veiller à ne pas contrôler en pratique la société franchisée.
• En cas de prise de participation élevée
La prise de participation élevée est déconseillée au franchiseur en considération de l’exigence constante, en droit de la franchise, d’indépendance du franchisé. Si, de facto, le franchiseur détient une part importante du capital de son franchisé, l’indépendance de ce dernier n’est plus assurée, augmentant ainsi les risques de requalification du contrat de franchise en contrat de travail, ou encore les risques d’application du droit des concentrations.
2. LE RISQUE LIE A LA DIMINUTION DE L’INDEPENDANCE DU FRANCHISE
L’indépendance du franchisé relève de l’essence du contrat de franchise. Elle en constitue un élément indispensable.
La prise de participation du franchiseur dans la société de son franchisé constitue incontestablement un élément favorisant la contestation ultérieure par le franchisé de son indépendance à l’égard du franchiseur. Bien entendu, la diminution de l’indépendance du franchisé dépend surtout des pouvoirs qui sont octroyés au franchiseur en contrepartie de cette prise de participation. Si aucun autre élément de dépendance n’existe dans le cadre de la relation entre le Franchiseur et son franchisé, alors le risque engendré par la prise de participation est infime. En revanche, si la prise de participation s’accompagne d’une implication du franchiseur dans la gestion du franchisé, ou d’une capacité pour le franchiseur d’influencer des décisions stratégiques du franchisé, alors le risque encouru par le Franchiseur est plus élevé.
En pratique, trois types de conséquences peuvent essentiellement être envisagés :
• Le contrat de franchise requalifié en contrat de travail
En cas de différend entre le franchiseur et le franchisé, pendant ou à l’issue du contrat de franchise, le franchisé peut chercher à obtenir la requalification de son contrat en contrat de travail. Le contrat de franchise peut être requalifié en contrat de travail dès lors qu’il existe entre le franchiseur et le franchisé un lien de subordination juridique permanente entre eux, au bénéfice du franchiseur (Article L.8221-6 du code du travail).
Intrinsèquement, la relation de franchise implique une certaine domination du franchiseur qui bénéficie d’un pouvoir de contrôle du respect de son savoir-faire, ainsi qu’un pouvoir économique, et il n’est pas toujours aisé de différencier le contrôle du respect des obligations essentielles liées à la franchise, d’une subordination juridique. Font par exemple partie de ses obligations, selon la jurisprudence, la fixation par le franchiseur de prix maxima indicatifs (CA Dijon, 30 juin 2005), l’intervention du franchiseur sur les horaires du franchisé a posteriori en raison de plaintes de la clientèle (CA Pau, 26 juillet 2000), l’obligation d’utiliser l’enseigne du réseau ou encore les indications relatives à l’organisation matérielle de l’activité du magasin (CA Dijon, 30 juin 2005).
La jurisprudence, dont l’analyse est fondée sur un faisceau d’indices, a identifié certains éléments d’indépendance du franchisé, qu’il serait bon de pouvoir maintenir avec les franchisés dans lesquels le franchiseur envisagerait de prendre des participations : la liberté de pratiquer des prix inférieurs à ceux indiqués par le franchiseur (cette obligation étant elle-même imposée par les règles de droit de la concurrence), la prospection de la clientèle et l’exécution des contrats par le franchisé, la liberté de choisir des marchandises dans la gamme offerte par le franchiseur, la liberté d’embaucher du personnel, l’absence de chiffre d’affaires minimum imposé ou encore le fait que le franchisé assume les charges et pertes de son activité. Le fait que le franchisé soit libre de céder son fonds a été pris en compte par la jurisprudence en tant qu’indice de l’indépendance du franchisé. Néanmoins, une telle liberté n’est pas envisageable en l’espèce, le contrôle de la cession du fonds étant l’objectif principal de la prise de participation du franchiseur dans la société franchisée.
Conséquences : La requalification du contrat de franchise en contrat de travail est lourde de conséquences pour le franchiseur qui peut se voir condamné à verser au franchisé une indemnisation liée à sa qualité de salarié (rappel de salaires, rappel de congés payés, bénéfice du régime général de sécurité sociale) ainsi qu’à lui rembourser son droit d’entrée. Par ailleurs, le franchiseur encourt les sanctions pénales applicables au travail dissimulé. Le délit de dissimulation d’emploi salarié est prévu à l’article L.8221-5 du code du travail et est sanctionné de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende (article L.82241 du code du travail).
• L’application des dispositions du code du travail
Le contrat de franchise peut être maintenu et ne pas être requalifié en contrat de travail, sans pour autant exclure l’application des règles du droit du travail au dirigeant de la société franchisée. En effet, l’article L.7321-2 du code du travail prévoit une extension des règles du droit du travail à des personnes non salariées, sans lien de subordination juridique avec le franchiseur (à la différence de l’hypothèse précédente). Cette disposition peut être appliquée à une personne morale, et donc à la société franchisée dans laquelle le franchiseur détiendra des parts.
En substance, ce statut est accordé au franchisé :
– dont l’activité principale consiste à vendre des produits fournis exclusivement ou quasi-exclusivement par le franchiseur, ou à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises à traiter, manutentionner ou transporter ;
– dont le local a été fourni ou agréé par le franchiseur ;
– dont les conditions de travail et les prix sont imposés par le franchiseur.
Conséquences : Bien que plus limitées que dans l’hypothèse de la requalification du contrat de franchise, les conséquences restent sévères pour le franchiseur qui peut devoir verser des dommages et intérêts au franchisé dont il se serait séparé (indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, compensatrice de préavis, de congés payés) ; il est par ailleurs tenu d’assurer au franchisé un salaire minimum prévu par la convention collective applicable. Le franchiseur peut encore être condamné à rembourser au franchisé les frais de constitution de sa société et de lui rembourser son droit d’entrée.
• Le franchiseur dirigeant de fait de la société franchisée
Même s’il n’est pas dirigeant en droit de la société franchisée, le franchiseur peut être considéré comme étant dirigeant de fait de la société. Une telle qualification est indépendante de la prise de participation du franchiseur au capital, mais est en pratique favorisée par cette prise de participation, le franchiseur étant souvent plus impliqué dans la gestion de la société franchisée lorsqu’il y a investi des fonds.
En pratique, la qualité de dirigeant de fait est retenue lorsqu’une personne a exercé, en toute souveraineté et indépendance, une activité de direction et de gestion. Compte tenu de la nécessaire indépendance du franchisé, cette qualification est rarement retenue (Pour des exemples dans lesquels la gestion de fait a été exclue : CA Toulouse, 4 mai 2005 (Juris-Data n° 03/02479) ; CA Paris, 4 avril 2003 (Juris-Data n°2002/10050)).
Ainsi par exemple, la qualité de dirigeant de fait pourrait ressortir de la prise de décisions contraires à l’intérêt de la société franchisée, en toute indépendance (Cass. com. 24 juin 2008, n° 07-13 .431). De même, le franchiseur sera considéré comme dirigeant de fait s’il a exercé en fait par l’intermédiaire d’une personne physique qu’il a choisie et qui a agi sous son emprise, des pouvoirs de direction sur la société franchisée (Cass. com., 27 juin 2006, n° 04-15.831).
Conséquences : La qualification de dirigeant de fait est appliquée dans l’hypothèse où la société franchisée fait l’objet d’une procédure collective. Le franchiseur, s’il était qualifié de dirigeant de fait, pourrait faire l’objet d’une action en responsabilité pour insuffisance d’actif si le franchiseur a commis une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif du franchisé (Art. L.651-2 du Code de commerce).
3. LES RISQUES ENCOURUS AU REGARD DU DROIT DES CONCENTRATIONS
Sur le plan du droit des concentrations, cette opération pourrait soulever des interrogations en matière de droit de la concurrence, notamment car la prise de participation, même minoritaire, peut constituer une concentration par prise de contrôle conjoint dès lors qu’elle aboutit à octroyer au franchiseur une influence déterminante sur le franchisé.
On étudiera les conditions dans lesquelles la prise de participation du franchiseur pourrait conduire à un contrôle conjoint de la société franchisée. On reprendra brièvement les seuils de chiffres d’affaires qui doivent être remplis par les entreprises pour que l’opération soit notifiable aux autorités de concurrence.
• Seuils communautaires
Deux séries de seuils sont applicables en droit communautaires.
– s’agissant des seuils les plus élevés (dits « grands seuils »), les chiffres d’affaires mondiaux cumulés des deux entreprises concernées (le groupe du franchiseur et le franchisé) doivent atteindre plus de 5 milliards d’euros ; chacune des deux entreprises doit réaliser plus de 250 millions de chiffres d’affaires dans l’Union Européenne.
– s’agissant des « petits seuils », en substance les chiffres d’affaires cumulés des entreprises doivent atteindre (i) 2,5 milliards d’euros dans le monde, (ii) 100 millions dans chacun d’au moins trois Etats membres de l’Union Européenne. Par ailleurs, chacune des deux entreprises doit réaliser (i) 25 millions d’euros dans chacun des trois Etats membres précités, et (ii) 100 millions dans l’Union européenne.
On rappellera que même si les seuils précités sont atteints, le contrôle des concentrations peut demeurer français si les deux entreprises concernées réalisent chacune plus des deux tiers de leur chiffre d’affaires européen en France.
• Seuils français
Les seuils français « de droit commun » :
Les seuils de chiffres d’affaires applicables aux concentrations d’ampleur nationale sont les suivants :
– le chiffre d’affaires total mondial cumulé des deux entreprises concernées doit être supérieur à 150 millions d’euros HT ;
– chacune des deux entreprises doit réaliser en France au moins 50 millions d’euros de chiffre d’affaires HT.
Jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 (Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, dite « LME »), ces seuils auraient été applicables à l’opération envisagée. Néanmoins, il est très probable que l’opération envisagée soit contrôlable dès que des seuils inférieurs aux seuils précités seront atteints.
Les seuils réduits applicables aux entreprises exerçant une activité de « commerce de détail » :
La LME a introduit des seuils de chiffres d’affaires réduits afin de contrôler plus efficacement les concentrations ayant lieu dans le commerce de détail.
Les seuils réduits :
– le chiffre d’affaires mondial cumulé des deux entreprises concernées doit atteindre 75 millions d’euros HT ;
– le chiffre d’affaires réalisé en France par chacune des deux entreprises dans le secteur du commerce de détail s’élève a minima à 15 millions d’euros.
Les activités concernées :
– L’expression « commerce de détail » fait l’objet d’une acception large. Si en principe le commerce de détail s’entend comme « la vente de marchandise à des consommateurs pour un usage domestique », l’Autorité de la concurrence y inclut également des activités qui ne relèvent pas de la vente de marchandise (Lignes directrices de l’Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, §75.).
– Les magasins de commerce de détail dont le chiffre d’affaires est pris en compte sont définis comme ceux qui réalisent plus de 50% de leur chiffre d’affaires avec l’une des activités relevant du commerce de détail (si par exemple 51% du chiffre d’affaires est réalisé par des ventes aux professionnels, l’activité n’entre pas dans le champ des seuils réduits, et est contrôlée par les seuils de droit commun).
• La notion de prise de contrôle conjoint
La prise de contrôle du fait d’une influence déterminante sur l’activité de l’entreprise
La notion de contrôle :
Une entreprise est contrôlée par une autre entreprise dès lors que l’entreprise contrôlante peut exercer une influence déterminante sur l’activité de l’entreprise contrôlée (la société franchisée). Cette possibilité doit être réelle, mais il n’est pas nécessaire de prouver que l’influence déterminante est ou sera effectivement exercée.
Le contrôle conjoint :
Une situation de contrôle conjoint peut exister alors même qu’il n’existe pas de parité entre les deux entreprises contrôlantes en termes de votes ou de représentation dans les organes de décision. Le contrôle conjoint ne suppose pas que les entreprises contrôlantes aient le pouvoir de déterminer la gestion courante de l’entreprise contrôlée. Ce qui importe en pratique pour les autorités de concurrence c’est le pouvoir de contrôle sur les décisions stratégiques de l’entreprise contrôlée.
L’influence déterminante :
Le plus souvent ce sont les droits conférés à l’actionnaire qui déterminent l’influence déterminante. Néanmoins, elle peut ressortir d’un faisceau d’indices, intégrant par exemple les relations contractuelles, financières etc. (très exceptionnellement on admet même l’existence d’une influence déterminante sans participation au capital). Elle peut notamment ressortir des droits conférés aux actionnaires : une participation minoritaire peut permettre d’exercer une influence déterminante par exemple si elle est assortie de droits qui excèdent ce qui est normalement consenti à des actionnaires minoritaires afin de protéger leurs intérêts financiers. Parmi ces droits on retrouve par exemple :
– des droits de veto (stratégie, nomination des dirigeants, investissements, budget)
– la possibilité de bénéficier de droits particuliers conférant (y compris dans le futur) une part dans les décisions supérieure à la part dans le capital ;
– la possibilité de nommer certains responsables au sein des organes dirigeants de l’entreprise ;
– la possibilité de monter ultérieurement dans le capital (options d’achats, titres convertibles) ;
– la possession de droits de préemption ou de préférence ;
– la possibilité d’obtenir des informations détaillées sur les activités de l’entreprise (en particulier si elles sont généralement réservées au management ou aux entreprises mères).
Si le franchiseur entend exercer l’un de ses droits, et notamment le droit de préemption à l’issue du contrat de franchise, elle devra limiter au maximum les pouvoirs qu’elle exerce et les autres droits qui lui sont accordés dans le cadre de la gestion du franchisé et de ses prises de décision, sous peine de risquer d’être considérée comme détenant le contrôle conjoint de la société franchisée.
Néanmoins, s’agissant des contrats de franchise, il convient de préciser que le risque demeure limité, compte tenu du fait que la Commission européenne, reprise par l’Autorité de la concurrence, indique que : « les accords de franchise ne permettent pas, en principe, au franchiseur de contrôler les activités du franchisé. Le franchisé exploite généralement les ressources de l’entreprise pour son compte propre, même lorsque l’essentiel des éléments d’actifs appartiennent au franchiseur ». Les contrats de franchise bénéficient d’une sorte de présomption de non-contrôle du franchiseur sur le franchisé. Pourtant, il conviendra être vigilant notamment compte tenu des décisions récentes rendues en la matière (Décisions de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-64 et n° 10-DCC-04).
Dans l’une de ces décisions (Décision n° 09-DCC-64 du 17 novembre 2009 autorisant le groupe de distribution Intermarché à prendre le contrôle d’un supermarché franchisé), l’Autorité a considéré que la tête de réseau disposait d’importants moyens de contrôle de l’adhérent :
– dans les statuts de l’adhérent tout d’abord : en contrepartie de l’action de préférence qu’ITM ENTREPRISES détenait dans le capital de l’adhérent, les statuts de l’adhérent prévoyaient au bénéfice de la tête de réseau, pendant une durée supérieure à 10 ans (la durée exacte n’est pas précisée dans la décision pour protéger le secret des affaires), la possibilité de :
- bloquer tout changement d’enseigne,
- s’opposer à toute mutation d’actions,
- obliger les actionnaires majoritaires à céder le fonds de commerce s’ils venaient à exploiter un fonds de commerce similaire sous une enseigne concurrente.
– dans le contrat de distribution ensuite : le contrat d’enseigne confère à la tête de réseau, à nouveau pendant une durée supérieure à 10 ans :
₋ un droit de préférence en cas de cession du fonds de commerce à un prix calculé selon une formule prédéterminée.
En outre, après la période de plus de 10 ans précitée, même si la tête de réseau n’a plus la possibilité de bloquer tout changement d’enseigne ou de s’opposer à toute mutation d’actions, elle conserve un droit de préférence sur toute vente de titres pendant 5 ans supplémentaires.
Dans une affaire récente (Décision de l’Autorité de la concurrence n° 10-DCC-04 du 14 janvier 2010 relative à la prise de contrôle exclusif des actifs des sociétés Arige et Douprim par la société CSF (groupe Carrefour)), la tête de réseau détenait uniquement 1% des sociétés concernées par l’opération. Elle a néanmoins été considérée comme détenant le contrôle conjoint de ses distributeurs en considération du fait que :
– les statuts du franchisé prévoient que l’enseigne sous lesquelles les sociétés exploitent leur magasin sont obligatoirement des enseignes du groupe de la tête de réseau ;
– la tête de réseau dispose d’un droit de véto sur toute modification statutaire, et dispose donc – en application du précédent paragraphe – du pouvoir de s’opposer à tout changement d’enseigne si la nouvelle enseigne n’appartient pas à son groupe.
En résumé, si la conclusion de contrats de franchise peut difficilement, per se, constituer une prise de contrôle, il peut en revanche exister une influence déterminante lorsque d’autres éléments sont pris en considération. Les clauses qui sont alors observées sont celles qui limitent l’autonomie du franchisé :
– dans la conduite de sa politique commerciale (ex : transfert du risque commercial à la tête de réseau) ;
– dans les possibilités de changer de réseau.
L’influence déterminante peut ressortir de la combinaison entre le contrat de franchise et l’acquisition d’actifs (fonds de commerce, stocks, locaux) susceptible de donner à la tête de réseau le contrôle des actifs du franchisé.
Elle peut également ressortir de la combinaison entre le contrat de franchise et la modification de statuts du franchisé. S’agissant des contrats de franchise, lorsque le franchiseur acquiert une participation seulement minoritaire, l’influence déterminante peut provenir de la combinaison avec la modification des statuts du franchisé. L’Autorité de la concurrence apprécie alors l’éventuelle influence déterminante que ces statuts pourraient conférer au franchiseur (par exemple la précision que l’activité ne peut être exercée que sous l’enseigne considérée ou une enseigne exploitée par l’une des sociétés du groupe et que le franchiseur doit donner son accord à toute modification des statuts sur ce point ; ou encore la précision d’une très longue durée pendant laquelle le franchisé ne peut pas sortir du réseau).
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