CA Paris, 2 mars 2016, RG n°13/21059
Le contrat de franchise peut utilement prévoir que le dirigeant de la société franchisée en cours de formation restera tenu personnellement et solidairement des engagements du contrat repris.
Ce qu’il faut retenir : Le contrat de franchise peut utilement prévoir que le dirigeant de la société franchisée en cours de formation restera tenu personnellement et solidairement des engagements du contrat repris.
Pour approfondir : La dirigeante d’une société en cours de formation a conclu un contrat de franchise, lequel précisait qu’elle resterait tenue personnellement et solidairement des engagements contractuels une fois la société immatriculée et le contrat de franchise repris par cette société. Profitant de cette clause, le franchiseur assigna la dirigeante en paiement des factures de redevances à la suite du placement en liquidation judiciaire de la société franchisée. Condamnée en première instance, la dirigeante interjeta appel en excipant de la parfaite reprise du contrat de franchise par sa société une fois immatriculée qui est devenue, par-là, la seule titulaire du contrat. La dirigeante souleva également, à titre subsidiaire, l’extinction de la créance du franchiseur à l’égard de la société franchisée faute d’avoir régulièrement déclaré cette créance à la procédure de liquidation ce qui entrainait, selon la dirigeante, l’extinction de sa propre obligation de paiement qui était accessoire à l’obligation de la société. La Cour rejeta chacun des arguments précédents et condamna la dirigeante au règlement des redevances demeurées impayées. S’agissant de l’argument principal de la dirigeante (la substitution pure et simple de la société immatriculée en lieu et place de la dirigeante), la Cour releva la présence d’une clause au contrat de franchise ne laissant aucun doute et aucune interprétation possible quant à la qualité de codébitrice solidaire de l’appelante : « Mme X restera tenue personnellement et solidairement de respecter les termes et conditions du présent contrat ».
S’agissant de l’argument subsidiaire soulevé par la dirigeante (l’extinction de son obligation du fait de l’extinction de la créance du franchiseur envers la société franchisée), le raisonnement de la Cour se fait en deux temps :
- selon l’article L. 622-26 du Code de commerce, une créance non-déclarée (au passif dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire) n’est pas éteinte mais est seulement inopposable à la liquidation ;
- selon l’article 1208 du Code civil, si le codébiteur solidaire peut opposer au créancier les exceptions inhérentes à la nature des obligations (par exemple une obligation dont la cause serait illicite) ou les exceptions qui sont personnelles à ce codébiteur (par exemple, une incapacité de contracter), le codébiteur ne peut pas opposer des exceptions qui sont purement personnelles à son propre codébiteur.
Autrement dit, l’absence de déclaration de la créance par le franchiseur à la liquidation judiciaire a rendu cette créance inopposable par le franchiseur à l’égard de la seule société franchisée (représentée) mais la créance, non-éteinte, reste opposable au codébiteur de la société franchisée (en l’espèce, à la dirigeante) dont l’obligation de paiement est distincte de celle de la société franchisée. Sans cette clause du contrat de franchise prévoyant clairement la solidarité de la dirigeante une fois la société immatriculée, le franchiseur aurait subi la liquidation judiciaire et serait demeuré impayé.
A rapprocher : Article 1843 du Code civil