CE, 7 octobre 2016, n°395211
Lorsque le juge des référés prononce la suspension d’une décision de refus de permis de construire et qu’il enjoint à l’autorité administrative de se prononcer de nouveau sur la demande, le permis ainsi délivré présente lui-même un caractère provisoire.
Ce qu’il faut retenir : En application de l’article L.511-1 du Code de justice administrative, le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire : par conséquent, lorsque le juge des référés prononce la suspension d’une décision de refus de permis de construire et qu’il enjoint à l’autorité administrative de se prononcer de nouveau sur la demande, le permis ainsi délivré présente lui-même un caractère provisoire.
En raison de sa nature provisoire, ce permis de construire peut alors faire l’objet d’une décision de retrait, si, statuant sur le fond du litige, la juridiction administrative confirme le bien-fondé de la décision de refus du permis de construire.
Le Conseil d’Etat précise toutefois que ce retrait obéit à un régime particulier, distinct de celui prévu par l’article L424-5 du Code de l’urbanisme : il peut en effet intervenir dans un délai de trois mois à compter de la notification, à l’administration, du jugement intervenu au fond, et sous réserve que le pétitionnaire ait été au préalable mis à même de présenter ses observations.
Pour approfondir : Une société sollicite un permis de construire pour édifier une maison d’habitation et un garage, mais le maire refuse sa délivrance.
Cette décision de refus est contestée par la société pétitionnaire, qui demande parallèlement au juge des référés de suspendre la décision de refus et d’enjoindre le maire de se prononcer de nouveau sur la demande. Par ordonnance du 7 mars 2014, le juge des référés fait droit à cette requête, et ordonne au maire d’instruire à nouveau la demande et de se prononcer dans un délai d’un mois.
Par arrêté du 28 juillet 2014, le permis de construire est donc délivré au visa de cette ordonnance. S’estimant satisfaite de l’issue de cette procédure, la société pétitionnaire se désiste de sa requête en annulation, toujours en cours d’instruction : le tribunal administratif lui en donne acte par ordonnance du 5 août 2015.
Mal lui en a pris puisque le 8 octobre 2015, la mairie retire le permis de construire délivré le 28 juillet 2014 en considérant que l’abandon de la contestation du refus initial de permis de construire avait rendu ce dernier définitif.
Le juge des référés, saisi par la société pétitionnaire, suspend cette décision de retrait, après avoir considéré que le délai de trois mois, décompté à compter de la signature du permis, tel que fixé par l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme pour permettre à l’administration de retirer un permis si ce dernier se révèle illégal, était expiré.
Le Conseil d’Etat, saisi par la commune d’un pourvoi contre cette décision, censure l’ordonnance et valide la décision de la commune :
- Il censure l’ordonnance après avoir considéré que l’article L.424-5 n’est pas applicable au retrait d’un permis de construire délivré à titre provisoire pour l’exécution d’une ordonnance de référé ;
- Il valide la décision de la commune ayant prononcé le retrait du permis de construire provisoire pour tirer les conséquences de la décision des juges du fond ; il pose néanmoins une limite à la possibilité de notifier un tel retrait, en considérant que ce dernier doit intervenir dans un délai raisonnable, qui ne saurait excéder trois mois à compter de la notification du jugement au fond, et après mise en œuvre d’une procédure contradictoire.
A rapprocher : L.424-5 du Code de l’urbanisme