Cessation d’utilisation des signes distinctifs quand le franchisé tombe en redressement

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ZANETTE Alissia

Avocat

Cass. com., 20 septembre 2016, n°15-12.724

Le franchiseur ne peut obtenir une seconde ordonnance pour faire cesser l’usage des signes distinctifs du réseau et le paiement d’une indemnité contractuelle quand une première ordonnance a été rendue et qu’il agit après l’ouverture d’une procédure de redressement.

Ce qu’il faut retenir : Le franchiseur ne peut obtenir une seconde ordonnance pour faire cesser l’usage des signes distinctifs du réseau et le paiement d’une indemnité contractuelle quand une première ordonnance a été rendue et qu’il agit après l’ouverture d’une procédure de redressement.

Pour approfondir : Après la fin d’un contrat de franchise arrivé à son terme en 2009, le franchiseur a assigné son ancien franchisé en référé pour obtenir la cessation de l’usage des signes distinctifs du réseau de lavage de voitures L’ELEPHANT BLEU et le paiement par le franchisé de l’indemnité prévue en ce cas par le contrat ; l’ordonnance a été rendue en 2011 en faveur du franchiseur et précisait notamment que l’ancien franchisé devait remplacer les couleurs bleu et blanc de la franchise par toute autre couleur de son choix qui ne rappellerait pas le réseau.

Constatant que son ancien cocontractant persistait à utiliser les signes distinctifs du réseau (la couleur bleu), le franchiseur a souhaité obtenir une nouvelle ordonnance afin d’obtenir la cessation de ce trouble manifestement illicite et le paiement d’une nouvelle indemnité ; il a donc une nouvelle fois assigné celui-ci en référé mais cette fois-ci face au mandataire judiciaire de l’ancien franchisé tombé en redressement judiciaire en 2012.

Toutefois, cette seconde demande a été déclarée irrecevable par le juge des référés dans une ordonnance défavorable.

Saisie par le franchiseur, la Cour d’appel de Colmar a confirmé cette seconde ordonnance. La Cour se prononce sur 3 points distincts :

  1. le franchiseur souhaitant par ce biais obtenir de nouveau la même décision, sa demande se heurte à l’autorité de la chose jugée de la première ordonnance ; elle est donc irrecevable. La Cour précise que la 1ère décision s’impose au mandataire judiciaire, peu important qu’elle ait été rendue à l’encontre de la société alors qu’elle n’était pas encore en redressement ;
  2. le Tribunal s’est à juste titre appuyé sur l’article L.622-17 du code de commerce en décidant que le franchiseur n’invoquait pas une créance postérieure à l’ouverture de la procédure collective mais une créance antérieure à celle-ci dès lors qu’elle trouvait sa source dans le contrat de franchise conclu antérieurement à l’ouverture de ladite procédure : le paiement de l’indemnité ne peut donc être accordé ;
  3. le fait que le franchiseur reproche uniquement la poursuite de l’usage de la couleur bleu, alors que la 1ère ordonnance ordonnait la cessation de tous les signes distinctifs (enseigne, affiche et couleur bleu et blanc) exclut l’existence d’un trouble manifestement illicite.

Le franchiseur a formé un pourvoi en cassation en réfutant chacun des 3 points de la façon suivante :

  1. la méconnaissance de la 1ère ordonnance (par la poursuite de l’usage du bleu) constitue un fait nouveau qui ne se heurte pas à l’autorité de la chose jugée ;
  2. la demande de paiement du franchiseur entre dans le cadre de l’article L.622-17 du code de commerce dès lors qu’il s’agit d’une créance résultant d’une faute inhérente à la poursuite de l’activité après l’ouverture de la procédure de redressement et étant donc par essence une créance postérieure au sens de ce texte ;
  3. puisque la 1ère ordonnance impose le remplacement du blanc et du bleu, la 2nde ordonnance ne peut pas, du fait de l’autorité de la chose jugée attachée à la 1ère ordonnance, accepter la poursuite de l’usage du bleu.

La Cour de cassation n’a pas suivi le raisonnement du franchiseur, dont les moyens n’étaient pourtant pas si inaudibles :

  1. la seconde procédure de référé porte sur la même demande (la cessation de l’utilisation des signes distinctifs) entre les mêmes parties : l’autorité de la chose jugée rend donc les demandes du franchiseur irrecevables ;
  2. l’exploitation des signes distinctifs après l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire ne constitue ni une créance née pour les besoins du déroulement de la procédure, ni une créance en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur. N’entrant dans aucun des deux cas prévus par l’article L.622-17, I du code de commerce, cette créance ne peut être payée à son échéance. Le Franchiseur ne pouvait que demander l’inscription du montant au passif de la société franchisée mais pas en demander le paiement ;
  3. sur l’existence d’un trouble manifestement illicite, la Cour écarte rapidement le débat : les demandes au titre de ce trouble se heurtant à l’autorité de la chose jugée, cela suffit à justifier la décision de la Cour d’appel.

Autrement dit, une fois l’ancien franchisé placé en redressement judiciaire, les mesures visant à faire cesser l’usage par celui-ci des signes distinctifs ont malheureusement peu d’efficacité : les demandes de paiement dissuasives sont mises en suspens ; or on le voit, sans cette menace financière il est difficile de faire respecter cette obligation post-contractuelle.

A rapprocher : Article L622-17 du Code de commerce

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