Cass. com., 13 septembre 2017, n°16-13.674
Les dividendes n’ont pas d’existence juridique avant leur mise en attribution par décision de l’organe social compétent…
Ce qu’il faut retenir : Les dividendes n’ont pas d’existence juridique avant leur mise en attribution par décision de l’organe social compétent. Une saisie-attribution, pour recouvrer la créance que le Trésor Public détient sur un associé, des sommes affectées au poste « report à nouveau » par décision de la collectivité des associés, est ainsi exclue.
Pour approfondir : Le gérant et associé d’une société civile immobilière est débiteur en son nom propre de la somme de 53 570,49 euros à l’égard du Trésor public. Le service des impôts des particuliers, souhaitant que le gérant associé recouvre sa créance, a mis en œuvre une saisie-attribution des sommes dues par la SCI à son gérant associé. La SCI s’est défendue arguant du fait que ses bénéfices n’avaient pas été distribués mais affectés au compte « report à nouveau ».
La Cour d’appel de Nîmes a condamné la SCI à payer au service des impôts des particuliers la somme visée, au motif que la créance du gérant associé sur celle-ci résulte de la déclaration des revenus fonciers de l’année 2011 du gérant associé, peu important l’affectation que la SCI a réservé à ses bénéfices.
La Cour de cassation casse la décision d’appel au visa des articles L.211-3 et R.211-15 du Code des procédures civiles d’exécution et des articles 1842 et 1852 du Code civil, au motif que les dividendes n’ont pas d’existence juridique avant la constatation des sommes distribuables par l’organe social compétent et la détermination de la part attribuée à chaque associé. Ainsi en l’absence d’une telle décision, la SCI n’était pas débitrice à l’égard du gérant associé et ne pouvait être condamnée aux causes de la saisie pour avoir méconnu son obligation de renseignement. La chambre commerciale vient ici confirmer que les dividendes ne naissent qu’à compter de la date de l’assemblée décidant de leur mise en attribution.
Loin d’être évidente, cette solution fait application du droit des sociétés de la manière la plus pure qui soit et cela en contrevenant à la position de l’administration fiscale.
Cette solution s’appliquant par analogie aux démembrements de droits sociaux vient créer de nouvelles possibilités de montages fiscaux.
A titre d’exemple, dans l’arrêt n°07-21.806 du 10 février 2009, un père de famille avait démembré les droits sociaux de sa SCI en transmettant la nue-propriété à son enfant et en conservant l’usufruit. Il avait décidé de placer systématiquement le bénéfice distribuable en réserve avant de prendre la décision, quelques exercices plus tard, de distribuer les réserves au nu-propriétaire, évitant ainsi, à la fois les droits de mutation (car pour qu’il y ait donation indirecte, il faut que les sommes soient entrées dans le patrimoine du donateur ce qui n’est pas le cas, les dividendes n’ayant une existence juridique qu’à compter de leur date de distribution) et l’imposition de ces sommes à l’impôt sur le revenu.
En considérant que le dividende n’existe qu’à la suite de sa mise en attribution par décision de l’assemblée, la Cour de cassation rend licite les attitudes opportunistes des contribuables par une application inaltérée du droit des sociétés.
A rapprocher : Cass. com., 10 février 2009, n°07-21.806