Outre le défaut d’effectivité du service rendu, le juge s’attache également à la définition contractuelle du service commercial à rendre pour l’application de l’article L.442-6 I 1°) du Code de commerce.
Le Ministre de l’Economie a fait assigner deux sociétés d’un groupe de grossistes en fruits et légumes exerçant sur le Marché d’Intérêt National (le MIN) à Marseille afin de les faire condamner pour obtention et tentative d’obtention d’avantage sans contrepartie. Il faut en effet rappeler que, selon l’article L442-6 I 1°) du Code de commerce, « Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout […] commerçant […] d’obtenir ou de tenter d’obtenir d’un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu […] ».
En l’espèce, une des deux sociétés assignées avait conclu, avec 40 fournisseurs, un contrat stipulant dans l’une de ses clauses la souscription à un service de mise en avant consistant en la mise « à la disposition du fournisseur [d’] un espace clairement séparé, spécialement adapté et exclusivement dédié à ses produits, permettant […] d’identifier aisément les produits de la marque du fournisseur ». Elle avait également conclu le même type de contrat pour une mise en avant des fournisseurs sur son site internet.
Le Tribunal de commerce de Marseille a débouté le Ministre de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné à indemniser le préjudice moral des sociétés défenderesses à hauteur de 15.000 euros chacune, outre la publication du dispositif du jugement.
Pourtant, la décision a été tout autre en appel : la Cour d’appel de Paris a jugé que les services de mise en avant étaient fictifs puisque, notamment, (i) les grossistes se contentaient de placer les produits des fournisseurs signataires en premier rang par rapport aux autres fournisseurs, le Directeur Général d’une des sociétés assignées ayant d’ailleurs lui-même déclaré qu’il était techniquement impossible de modifier les airs de présentation des produits pour créer les espaces réservés prévus au contrat, (ii) le service de mise en avant visait l’identification de la « marque du fournisseur » or seuls 3 des fournisseurs signataires disposaient d’une marque et (iii) le site internet des grossistes n’était pas en activité pendant la durée d’exécution du contrat de sorte que la prestation était tout bonnement irréalisable. Par conséquent, la Cour a condamné les sociétés grossistes pour obtention d’un avantage indu s’agissant des prestations facturées aux fournisseurs et pour tentative d’obtention d’avantage indu s’agissant des contrats litigieux n’ayant donné lieu à aucune facturation des fournisseurs.
Partant, considérant que ces pratiques sont de nature à léser le consommateur en maintenant les prix à un niveau artificiellement élevé, la Cour a prononcé la nullité de la clause illicite, ordonné le remboursement des sommes payées à ce titre par les fournisseurs signataires et condamné les sociétés grossistes à une amende civile de 80.000€, outre la publication de l’arrêt sur le site des grossistes.