Cass. com., 2 juin 2015, pourvoi n°12-29.405
La cour de cassation pour la première fois affirme de façon claire que le créancier de l’indivision peut poursuivre l’indivisaire mis en redressement judiciaire pour une créance née antérieurement à l’ouverture de la procédure collective, bien qu’aucune déclaration de créance préalable n’ait été effectuée.
Ce qu’il faut retenir : La cour de cassation pour la première fois affirme de façon claire que le créancier de l’indivision peut poursuivre l’indivisaire mis en redressement judiciaire pour une créance née antérieurement à l’ouverture de la procédure collective, bien qu’aucune déclaration de créance préalable n’ait été effectuée.
Pour approfondir : En application de l’article L. 622-24 du Code de commerce, les créanciers ont l’obligation de déclarer leur créance née antérieurement au jugement d’ouverture de la procédure collective sous peine de la voir déclarée inopposable à ladite procédure.
La solution exposée par la chambre commerciale de la Cour de cassation est nouvelle, néanmoins elle n’est pas surprenante. En effet, l’indivision est une situation exceptionnelle qui mérite une certaine adaptation de la jurisprudence. Le créancier de l’indivision se distingue du créancier personnel d’un indivisaire, créancier que d’une seule personne composant l’indivision.
Dans un arrêt de la deuxième chambre civile de la cour de cassation en date du 16 mai 2013 n° 12-16.216, la Cour avait déjà eu l’occasion de poser une exception aux principes fondamentaux du droit des entreprises en difficulté, et plus précisément à la règle de l’arrêt des poursuites individuelles, au profit d’un créancier de l’indivision.
En l’espèce, une banque, créancière de l’indivision, détenant une créance antérieure à l’ouverture de la procédure collective d’un indivisaire, avait pu poursuivre la saisie et la vente du bien indivis pour être payée avant le partage.
Toutefois, la question, en présence de créancier de l’indivision, restait toujours d’actualité pour les autres règles du droit des entreprises en difficulté.
C’est sur ce point que la Haute juridiction a été saisie.
En l’espèce, les deux membres d’un couple avaient acquis chacun pour moitié un immeuble en indivision, grâce à un prêt souscrit au nom de Monsieur. Un jugement a ordonné la liquidation et le partage de l’indivision. Par la suite, Madame a été mise en redressement judiciaire, et a bénéficié d’un plan de redressement et l’immeuble indivis a été adjugé.
Monsieur a invoqué des créances au titre du remboursement de l’emprunt immobilier, des travaux d’amélioration réalisés sur l’immeuble indivis, ainsi que des taxes et frais acquittés avant l’ouverture du redressement judiciaire de Madame.
La Cour d’Appel a déclaré que ces créances antérieures, n’ayant fait l’objet d’aucune déclaration au passif de la procédure collective, étaient éteintes.
La Haute juridiction a censuré l’arrêt d’appel au visa de l’article 815-17 du code civil, dérogeant ainsi à la règle de principe de l’article L.622-24 du Code de commerce : « Attendu que l’indivisaire dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis peut faire valoir les droits qu’il tient de ce texte après l’ouverture de la procédure collective de l’un des indivisaires, sans avoir à déclarer sa créance à celle-ci ».
Cette solution marque une réelle distinction entre les créanciers de l’indivision et les créanciers d’un indivisaire, lesquels sont toujours obligés de déclarer leur créance lors de l’ouverture de la procédure collective.
A rapprocher : Cass. civ. 2ème, 16 mai 2013, pourvoi n°12-16.216