L’appréciation du caractère trompeur de comptes prévisionnels irréalistes dépend pour partie de la qualité et des compétences du franchisé considéré.
Ce qu’il faut retenir : L’appréciation du caractère trompeur de comptes prévisionnels irréalistes dépend pour partie de la qualité et des compétences du franchisé considéré.
Pour approfondir : Dans ces deux arrêts du 10 décembre 2013, la Cour de cassation est venu rappeler les obligations précontractuelles des franchiseurs en matière de comptes prévisionnels.
Les faits à l’origine de ces deux affaires sont identiques. Un contrat de franchise a été conclu pour une activité de conseil en gestion de patrimoine. Un accord de résiliation du contrat de franchise est ensuite conclu entre les deux sociétés et le même jour l’ex-franchisé conclu avec la filiale du franchiseur, chargée de l’exploitation et du développement du réseau, un contrat de licence d’enseigne et de partenariat commercial.
Moins d’un an plus tard, l’ex franchisé fait assigner le franchiseur et sa filiale en annulation du contrat de franchise sur les fondements du dol et absence de cause, et subsidiairement, en résiliation de ce contrat aux torts exclusifs du franchiseur et sa filiale, en nullité du contrat de licence de marque et pour obtenir la restitution des sommes versées par le franchisé et le paiement de dommages et intérêts.
Dans les deux cas, la Cour d’appel a rejeté la demande de nullité du contrat de franchise sur le fondement du dol et de l’absence de cause, aux motifs que le franchisé a conclu le contrat de franchise en parfaite connaissance de cause, le franchiseur ayant respecté son obligation d’information précontractuelle en transmettant les informations qu’il était légalement contraint de communiquer.
La Cour de cassation casse ces deux arrêts. Les magistrats ont rappelé certaines règles en matière de prévisionnels.
Ainsi, avant de considérer que le franchisé concerné était apte, vu son parcours professionnel, à apprécier le caractère réaliste ou non des prévisions délivrées par le franchiseur, la Cour d’appel doit vérifier si son expérience professionnelle lui permettait de se livrer à une telle appréciation.
En effet, la Cour de cassation relève que même si le franchisé était « consultant senior en audit de conseil en gestion des risques financiers », il travaillait auprès des collectivités locales, « domaine tout à fait différent de la défiscalisation du patrimoine des particuliers » objet de la franchise, a estimé la Cour.
La décision de la Cour d’appel est donc cassée pour défaut de base légale ; ainsi la Cour de cassation retient-elle en effet sur ce point : « Attendu que pour statuer comme il fait, l’arrêt, après avoir constaté que les comptes d’exploitation prévisionnels communiqués à M. X… par la société A… étaient irréalistes, retient que ce dernier, ancien salarié de la société partenaire de la société Ernst et Young, dans laquelle il occupait le poste de consultant senior en audit de conseil de gestion des risques financiers, était parfaitement apte à apprécier le caractère réaliste ou non de ces prévisions ; Attendu qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser en quoi l’expérience professionnelle acquise par M. X… qui alléguait avoir occupé précédemment un poste de consultant auprès des collectivités locales, domaine tout à fait différent de la défiscalisation du patrimoine des particuliers, aurait pu lui permettre de se livrer à une telle appréciation, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».
A rapprocher : CA Paris, 9 mai 2012, RG n°09/16724 et n°09/16742