Cass. com., 6 octobre 2015, pourvoi n°14-11.680
Une assemblée d’actionnaires appelée à se prononcer sur un projet de fusion n’excède pas ses pouvoirs en approuvant l’opération après avoir modifié le projet arrêté par l’organe de direction.
Ce qu’il faut retenir : Une assemblée d’actionnaires appelée à se prononcer sur un projet de fusion n’excède pas ses pouvoirs en approuvant l’opération après avoir modifié le projet arrêté par l’organe de direction.
Pour approfondir : Pour rappel, il appartient aux organes d’administration ou de direction (conseil d’administration, directoire, gérants, etc.) de chacune des sociétés participant à une opération de fusion, d’en arrêter un projet, lequel sera approuvé ou refusé par l’assemblée générale extraordinaire des associés ou actionnaires de chaque société (article R.236-1 du Code de commerce).
Dans la présente affaire, l’assemblée des actionnaires de la société absorbante et celle de la société absorbée avaient approuvé, dans les mêmes termes, la transmission par voie de fusion du patrimoine de la première de ces sociétés à la seconde.
Les actionnaires minoritaires de la société absorbée avaient alors demandé l’annulation des décisions d’approbation de la fusion, faisant valoir que les dispositions relatives à la valorisation des apports ainsi que les modalités de calcul de la parité d’échange avaient été modifiées, sans que ces modifications n’aient été inscrites à l’ordre du jour, comme le requiert l’article L.225-105 al. 3 du Code de commerce.
La question posée à la Cour de Cassation était donc celle de savoir si les assemblées d’actionnaires des sociétés appelées à se prononcer sur une opération de fusion, n’avaient d’autres choix que d’approuver ou de rejeter ledit projet de fusion, sans pouvoir le modifier.
La Cour de cassation a répondu pour la première fois à cette question, se prononçant négativement. Ainsi, les assemblées d’actionnaires peuvent valablement, sans méconnaître les pouvoirs des organes ayant arrêté le projet, approuver la fusion après en avoir modifié les conditions, notamment pour tenir compte des observations du commissaire à la fusion.
Elle a suivi le raisonnement adopté par les juges du fond, selon lequel l’ordre du jour de l’assemblée étant relatif, notamment, à « l’approbation du projet de fusion prévoyant la transmission universelle du patrimoine de la société au profit de la société H », l’assemblée n’était pas sortie des limites de l’ordre du jour en décidant d’approuver cette opération, quand bien même elle avait modifié la valeur de l’actif net apporté à la société absorbante.
Cette solution, qui se fonde sur le pouvoir souverain dont dispose l’assemblée pour rectifier les projets qui lui sont soumis, a été rendue relativement à une société anonyme mais peut être appliquée à toutes les sociétés commerciales. En outre, elle est transposable à une scission ou à un apport partiel d’actif soumis au régime des scissions. Il est également admis que l’assemblée a le pouvoir souverain d’apporter aux comptes annuels les modifications qu’elle juge utiles en cours de séance. Ces modifications sont valables bien qu’elles n’aient pas été communiquées au commissaire aux comptes ou aux actionnaires avant l’assemblée, sauf à prouver que les dirigeants les ont fait soumettre à l’assemblée par un associé pour contourner les règles légales de présentation des comptes.
A rapprocher : Article R.236-1 et article L.225-105 al. 3 du Code de commerce