Cass. civ. 3ème, 19 novembre 2015, pourvoi n°14-25.510
L’existence de bâtiments distincts n’est pas, en elle-même, de nature à justifier une répartition des charges par bâtiment.
Ce qu’il faut retenir : L’existence de bâtiments distincts n’est pas, en elle-même, de nature à justifier une répartition des charges par bâtiment.
Pour approfondir : Madame X., propriétaire de lots dans une copropriété composée de 12 bâtiments indépendants, est assignée par le syndicat des copropriétaires en paiement d’un arriéré de charges comprenant notamment le coût de travaux de réfection de parties communes consécutifs à des infiltrations survenues dans le bâtiment au sein duquel elle est propriétaire. La Cour d’appel ne la condamne qu’à la somme de 10.252,79 € au titre d’un arriéré de charges arrêté au 13 mai 2014.
Le syndicat des copropriétaires forme un pourvoi contre cette décision au motif que Madame X aurait également dû être condamnée à prendre en charge, au prorata de ses tantièmes, le coût des travaux de réfection des parties communes du bâtiment, le coût de ces travaux ne devant pas être réparti entre tous les copropriétaires des douze bâtiments dans la mesure où seul le bâtiment de Madame X. était concerné par les désordres. La Cour de cassation rejette le pourvoi au double motif suivant.
D’une part, la Haute Cour considère que, si le règlement de copropriété prévoit bien la possibilité que des charges incombant seulement à un ou à certains immeubles soient supportées par les copropriétaires de ce ou ces immeubles et réparties entre eux au prorata des millièmes des parties communes appartenant aux copropriétaires de ces immeubles, encore faut-il que ces charges soient définies par le règlement de copropriété, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
D’autre part, et dans le cadre du pouvoir souverain qui est le sien, la Cour d’appel a justement retenu que les travaux en cause constituaient, de par leur nature et leur montant, des grosses réparations affectant les parties communes de l’immeuble, sans distinction.
En conclusion, la Cour de cassation considère que le seul fait matériel qu’il existe plusieurs bâtiments distincts et que seul l’un ou plusieurs d’entre eux soi(en)t affecté(s) par les désordres ne permet pas de mettre à la charge exclusive des copropriétaires concernés le coût des réparations, dans le silence des dispositions du règlement de copropriété. Il est ici fait application des dispositions de l’article 10 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 aux termes duquel « [Les copropriétaires] sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes, proportionnellement aux valeurs relatives à des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l’article 5 ».
Si la jurisprudence est venue préciser que le règlement de copropriété d’un ensemble immobilier composé de plusieurs bâtiments pouvait prévoir que les charges d’entretien et de réparation des parties communes d’un bâtiment déterminé seraient réparties entre les seuls copropriétaires dont les lots composent ce bâtiment, c’est sous réserve que, d’une part, la nature des travaux ne puisse être interprétée comme affectant l’immeuble dans son ensemble – pris comme unité foncière – et, d’autre part, que le règlement de copropriété soit suffisamment précis pour permettre de déterminer quelles sont les parties communes générales et quelles sont les parties communes spéciales à un ou plusieurs bâtiments.
A rapprocher : Cass. civ. 3ème, 27 septembre 2005, pourvoi n°04-15.541