Cass. com., 10 novembre 2015, pourvoi n°14-14.636
L’apparence d’une société créée de fait par un agent commercial et ses sous-agents commerciaux n’est pas prouvée par le mandant dès lors que plusieurs éléments démontrent un lien exclusif entre le mandant et l’agent commercial, notamment dans les relevés de commission et factures liées.
Ce qu’il faut retenir : L’apparence d’une société créée de fait par un agent commercial et ses sous-agents commerciaux n’est pas prouvée par le mandant dès lors que plusieurs éléments démontrent un lien exclusif entre le mandant et l’agent commercial, notamment dans les relevés de commission et factures liées.
Pour approfondir : En l’espèce, une société mandante avait conclu un contrat d’agent commercial avec une personne physique pour négocier la vente de ses produits. Cet agent a eu recours à des sous-agents pour l’exercice de son activité avec lesquels il était contractuellement lié par deux contrats distincts.
Après avoir notifié à la mandante sa volonté de mettre fin à leur relation, l’agent commercial principal lui réclama l’indemnité de cessation de contrat d’agent commercial. La mandante s’opposa à ce paiement en invoquant l’existence d’une société créée de fait entre l’agent commercial et ses sous-agents qui empêchait l’agent commercial principal de résilier seul et personnellement le mandat.
Pour appuyer sa thèse d’une société créée de fait, la mandante invoquait une apparence globale d’une telle société résultant :
- de l’absence de connaissance par elle du contenu des contrats de sous-agents commerciaux ;
- de l’existence de courriers à entête commune des 3 agents commerciaux envoyés à des clients de la mandante et renvoyés ensuite à la mandante par lesdits clients ;
- du fait que si la mandante adressait ses courriers et relevés de commission au seul agent commercial principal, c’est parce qu’elle s’adressait en réalité au représentant de la société qu’elle pensait créée de fait entre l’agent commercial principal et ses sous-agents.
Rejetant ces arguments, la Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel et considère qu’aucune société créée de fait entre les trois agents commerciaux ne pouvait être retenue à l’égard de la mandante. En effet :
- les courriers à en-tête commune des trois agents commerciaux étaient en grande majorité adressés aux seuls clients et non à la mandante (les courriers adressés à la mandante directement étaient très rares) ;
- seul l’agent commercial principal adressait ses factures de commissions ;
- la mandante ne s’adressait qu’au seul agent commercial principal, notamment pour l’envoi des relevés de commission sur lesquels ne figurait que le nom de cet agent principal ;
- enfin, les courriers qu’envoyait l’agent principal à la mandante directement n’indiquaient que ses propres coordonnées (adresse, mail, etc.) alors que les coordonnées du bureau physique dans lequel il travaillait avec ses sous-agents étaient différentes.
Il résulte de cette décision que, pour apprécier l’existence d’une société créée de fait par un agent commercial et ses sous-agents notamment, il faut que tous les indices (ou en tout cas une majorité pertinente d’indices) convergent vers cette apparence, ce qui n’est bien évidemment pas le cas en l’espèce puisque les éléments les plus pertinents, à savoir les actes liés à la commission versée par la mandante, ne font pas référence aux prétendus associés de fait de l’agent principal.
A rapprocher : article 1832 du Code civil