Cass. civ. 3ème, 2 juin 2016, pourvoi n°15-16.967
Le diagnostiqueur qui a réalisé un mesurage erroné doit indemniser l’acquéreur du fait des frais bancaires supplémentaires engendrés ainsi que du surcoût de la commission d’agence, proportionnelle au prix de vente.
Ce qu’il faut retenir : Le diagnostiqueur qui a réalisé un mesurage erroné doit indemniser l’acquéreur du fait des frais bancaires supplémentaires engendrés ainsi que du surcoût de la commission d’agence, proportionnelle au prix de vente.
Pour approfondir : A la suite de l’intervention d’un diagnostiqueur ayant mesuré le lot vendu, Madame X., acquéreur, a mandaté un expert-géomètre afin de s’assurer de la superficie réelle de l’appartement acquis. Le géomètre ayant retenu une superficie de 105 m2 au lieu des 131 m² figurant dans l’acte de vente, Madame X. a sollicité en référé la désignation d’un expert, au contradictoire des époux Y., vendeurs, lesquels ont appelé en garantie le diagnostiqueur ainsi que l’agent immobilier. L’expert judicaire désigné a conclu à une superficie de 104 m2. Madame X. a alors assigné ses vendeurs en diminution du prix au visa de l’article 46 de la loi du 10 juillet 1965 relative à l’action en diminution du prix en cas de superficie réelle inférieure de plus de 1/20ème à celle exprimée dans l’acte de vente, le diagnostiqueur et l’agent immobilier en dommages-intérêts. Si le tribunal fait droit aux demandes de Madame X., et condamne notamment les vendeurs à lui payer la somme de 219.647 € en diminution du prix de vente, la Cour d’appel de Paris la déboute de toutes ses demandes.
En premier lieu, la Cour d’appel retient que le délai d’un an de l’article 46 est un délai de forclusion, insusceptible de suspension, à la différence du délai de prescription.
En l’espèce, si le délai avait effectivement été interrompu par l’action en référé du 24 juin 2010, un nouveau délai d’un an avait recommencé à courir à compter de la date du dépôt du rapport de l’expert, soit le 7 octobre 2010. L’action au fond engagée le 11 octobre 2011 était donc tardive.
En deuxième lieu, la responsabilité de l’agent immobilier n’est pas retenue, aux motifs qu’il n’était pas à l’origine du mesurage et n’avait pas à en vérifier l’exactitude.
Enfin, la Cour d’appel rejette la demande de l’acquéreur au titre des frais bancaires liés à un prêt contracté pour un montant supérieur à celui qui aurait dû être souscrit si le mesurage avait été le bon ainsi qu’à la commission d’agence, surévaluée, faute de démonstration d’un préjudice certain.
Si la Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel sur les deux premiers moyens développés – ce qui est étonnant s’agissant du moyen tiré de la prescription de l’action ; la Cour ayant jugé exactement le contraire dans un arrêt du 12 novembre 2015 –, elle censure le troisième moyen et retient la responsabilité du diagnostiqueur immobilier.
En effet, la Haute juridiction retient que le préjudice subi par l’acquéreur, bien que futur, était certain, comme l’avait d’ailleurs relevé la Cour d’appel.
Dans ces conditions, l’article 1382 du Code civil (futur article 1240 à compter du 1er octobre 2016) avait vocation à s’appliquer et le diagnostiqueur fautif est tenu pour redevable des frais bancaires supplémentaires engendrés par le prêt contracté pour un montant supérieur à celui qui aurait dû être souscrit si la superficie du bien avait été correctement évaluée.
En revanche, la Cour, constatant que la juridiction d’appel n’avait pas répondu aux conclusions de de Madame X. sur ce point, renvoie les parties devant la Cour d’appel de Versailles afin que soit tranchée la question de savoir si le diagnostiqueur pouvait également être condamné à prendre en charge le surcoût des frais d’agence ; la commission étant généralement proportionnelle au prix de vente, lui-même fixé au regard de la superficie du bien.
A rapprocher : Cass. civ. 3ème, 12 nov. 2015, pourvoi n°14-18.390