CE, 30 juin 2016, déc. n°380916
Une provision qui conserve le même objet que celle constituée au titre d’un exercice antérieur n’a pas à faire l’objet d’une reprise suivie d’une nouvelle dotation dès lors que des événements en cours à la clôture de l’exercice la justifient toujours, quand bien même ces événements seraient différents de ceux ayant motivé la constitution initiale.
Ce qu’il faut retenir : Une provision qui conserve le même objet que celle constituée au titre d’un exercice antérieur n’a pas à faire l’objet d’une reprise suivie d’une nouvelle dotation dès lors que des événements en cours à la clôture de l’exercice la justifient toujours, quand bien même ces événements seraient différents de ceux ayant motivé la constitution initiale.
Pour approfondir : Au titre de son exercice clos en 1996, une société exploitant un réseau d’agences de voyage a comptabilisé une provision destinée à prendre en compte la dépréciation de son fonds de commerce, compte tenu de l’incidence des pertes d’exploitation subies au cours des exercices antérieurs et du montant auquel avait été valorisé son fonds à l’occasion de sa cession, au cours de cette même année, par sa société mère. Entre 1996 et 2003, la société a développé son réseau en procédant, à compter de l’année 2001, à des acquisitions d’agences à titre onéreux, tout en apportant à d’autres sociétés certaines des agences acquises en 1994. La société a toutefois maintenu, au titre de son exercice 2003, l’inscription d’une provision pour dépréciation du fonds de commerce d’un même montant, compte tenu de l’appréciation qu’elle faisait alors des effets négatifs sur ses résultats des événements internationaux survenus en septembre 2001, ainsi que du changement des modes de consommation dans le secteur du tourisme.
A la suite d’un contrôle, l’administration a rapporté cette provision aux résultats du premier exercice non prescrit (clos en 2003) au motif que cette provision portait sur un objet différent de celui qui avait motivé la comptabilisation de la provision initialement inscrite au titre de son exercice 1996 compte tenu de l’évolution de la structure du fonds de commerce inscrit à l’actif de la société.
Le Conseil d’Etat a jugé que la société pouvait constater à la clôture de son exercice 2003 une provision correspondant à la provision ayant le même objet (à savoir, la dépréciation du fonds de commerce) initialement passée au titre de l’exercice 1996, même si les événements rendant probable la dépréciation à la clôture de l’exercice 2003 n’étaient pas les mêmes que ceux qui l’avaient initialement justifiée.
Autrement dit, il résulte de cet arrêt que l’on ne saurait confondre la perte ou le détournement d’objet d’une provision, qui nécessite une reprise, avec le changement de ses causes ou justifications, qui justifie le maintien ou la modification du montant de la provision. Cette solution a le mérite de ne pas alourdir le formalisme auquel sont tenues les entreprises dans le suivi de leurs provisions.
A rapprocher : article 39-1° du CGI