La décision commentée s’inscrit assurément dans la continuité d’avis déjà rendus par l’ADLC relativement à des réseaux de professionnels de l’optique agréés par des organismes complémentaires d’assurance maladie.
La décision commentée s’inscrit assurément dans la continuité d’avis déjà rendus par l’Autorité de la concurrence relativement à des réseaux de professionnels de l’optique agréés par des organismes complémentaires d’assurance maladie (v. par ex., Avis n°09-A-46 du 9 septembre 2009 ; Avis n°99-A-17 du 7 novembre 1999).
Dans cette affaire, deux mutuelles avaient organisé un réseau d’opticiens agréés, dénommé Kalivia, regroupant environ 2 300 opticiens, qui avait opéré une sélection de différents fournisseurs dont les produits étaient appelés à être référencés et vendus à ces bénéficiaires.
Deux fabricants de verre (et un syndicat d’opticiens) avaient saisi l’Autorité de la concurrence, pour deux motifs bien distincts :
– d’une part, ils reprochaient à Kalivia le caractère « opaque et discriminatoire de son processus de référencement » et le manque d’objectivité des critères retenus pour opérer ce référencement, à savoir la détention d’une part de marché significative et le fait de disposer d’un laboratoire de conception et d’un site de production ;
– d’autre part, ils dénonçaient une pratique tarifaire s’apparentant selon eux à une pratique de prix imposés.
Pour ce qui concerne le caractère opaque et discriminatoire des critères de référencement en cause, l’Autorité de la concurrence rappelle l’analyse qu’elle avait formulée dans l’Avis n°09-A-46, qui considérait déjà que les gestionnaires de réseau se comportent comme des « clients par subrogation de l’assuré » dans la mesure où ceux-ci sont conduits à prendre en charge 67% en moyenne du montant payé par les assurés (Avis, §§.169 et 170).
En premier lieu, l’Autorité de la concurrence rejette fermement la qualification de restriction de concurrence « par l’objet » de la pratique de sélection (§.166 et suiv.), en s’attachant « à la teneur de l’accord, ses objectifs et le contexte économique et juridique dans lequel il s’insère », considérant qu’un tel référencement se justifiait eu égard à la multitude de références de verres, des prix maxima négociés et du paramétrage de leur saisie informatique, et ce, il est vrai, pour permettre de proposer aux assurés (i.e. les consommateurs finaux) des produits et services de qualité à des prix compétitifs.
En second lieu, l’Autorité de la concurrence examine si les effets de ce référencement sur l’accès des fournisseurs non référencés au marché de la fourniture de verres ophtalmiques sont ou non restrictifs de concurrence ; elle conclut à l’absence d’un tel effet (Avis, §§.175 et suiv.) car le réseau Kalivia représente, sur la période concernée, une part très réduite des ventes de verres en France (moins de 5% des ventes totales en 2011 et moins de 1% en 2010), que pratiquement l’ensemble des fournisseurs a été intégré fin 2012, et que les fournisseurs non référencés saisissants ont vu leur chiffre d’affaires augmenter pendant cette même période.
Pour ce qui concerne la pratique tarifaire de prix imposés, l’Autorité de la concurrence rappelle (Avis, §§.200) que la Commission européenne exempte cette pratique dans le cadre de ses lignes directrices sur les restrictions verticales de concurrence ; en effet, « la pratique qui consiste à conseiller un prix de vente à un revendeur ou à exiger d’un revendeur qu’il respecte un prix de vente maximal est couverte par le règlement d’exemption par catégorie lorsque la part de marché de chacune des parties à l’accord n’excède pas le seuil de 30 %, à condition que cela n’équivaille pas à un prix de vente minimum ou fixe sous l’effet de pressions exercées par l’une des parties ou de mesures d’incitation prises par elle » (v. sur ce point, Lignes directrices de la Commission européenne du 19 mai 2010 sur les restrictions verticales, JO C 130, p.1, paragraphe 226).
L’Autorité de la concurrence décide que le mécanisme tarifaire du réseau Kalivia reposant sur des tarifs maxima déterminés par les opticiens dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres, n’a pas le caractère de prix imposés et permet des effets pro-concurrentiels sur le marché, en incitant au développement d’offres concurrentes au réseau (v. déjà en ce sens, Avis n°09-A-46 du 9 septembre 2009).