TUE, 13 septembre 2016, aff. T-408-15, n°15/00108
Le droit des marques se veut accueillant puisque, par principe, des signes de natures diverses sont susceptibles d’être protégés à titre de marque. Ils doivent tous remplir une condition sine qua non : présenter un caractère distinctif.
Ce qu’il faut retenir : Le droit des marques se veut accueillant puisque, par principe, des signes de natures diverses sont susceptibles d’être protégés à titre de marque. Ils doivent tous remplir une condition sine qua non : présenter un caractère distinctif.
L’arrêt commenté en donne une illustration à propos d’une demande de marque sonore.
Pour approfondir : Dans l’affaire ayant conduit à la décision commentée, une société avait déposé une demande de marque européenne sonore représentée graphiquement sur une portée musicale. L’examinateur de l’EUIPO avait rejeté cette demande aux motifs que le signe était constitué d’une sonnerie simple et banale et qu’il ne pouvait pas être perçu comme un indicateur de l’origine commerciale des produits. La chambre des recours, saisie par le déposant, a rejeté le recours en considérant qu’une marque constituée de sons s’apparentant à une sonnerie ne peut remplir une fonction d’identification que si elle comporte des éléments de nature à l’individualiser par rapport à d’autres marques. En l’espèce, la demande de marque était constituée de la répétition d’un son qui s’apparentait à un timbre d’une sonnerie en tout point banal et ce nonobstant le fait que la marque consistait en une portée en clé de sol sur un tempo de 147 notes noires par minute portant la répétition de deux sols dièse. Selon la chambre des recours la marque demandée se présentait comme un motif sonore d’une grande simplicité c’est-à-dire essentiellement comme une sonnerie banale et commune qui passerait inaperçue et ne serait pas mémorisée par le consommateur visé. Le Tribunal va tout d’abord rejeter le premier moyen opposé à l’encontre de la décision contestée en considérant que la chambre des recours a suffisamment motivé sa décision après avoir effectué un examen global couvrant l’ensemble des produits et services visés dans la demande d’enregistrement pour apprécier le caractère distinctif du signe. Sur le second moyen, le Tribunal va rappeler les règles relatives à la condition de distinctivité, rappelant que celle-ci signifie que la marque doit permettre d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux issus d’autres entreprises. Selon la jurisprudence constante, les marques visées à l’article 7§1 b) du règlement 207/2009 (« sont refusées à l’enregistrement : (…) b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ») sont celles qui sont réputées incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque à savoir d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service afin de permettre au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors de l’acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative.
Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits et services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent.
Enfin, le Tribunal rappelle que la Cour de Justice a posé que les critères d’appréciation du caractère distinctif sont les mêmes pour les différentes catégories de marques même s’il peut apparaitre plus difficile d’établir le caractère distinctif des marques de certaines catégories que celles d’autres catégories. Egalement, lorsque le signe est constitué seulement d’un élément sonore, le public n’a pas pour habitude de le percevoir comme un identifiant de l’origine commerciale sauf dans certains secteurs économiques tels que, par exemple, la télédiffusion.
Ces principes étant rappelés, le Tribunal va considérer au cas d’espèce : que la marque demandée peut être décrite comme « un son qui s’apparentait à une sonnerie de téléphone » ou comme « une sonnerie électronique spécifique évoquant un sonar composé de la répétition de deux notes ».
Cette excessive simplicité qui se limite à la répétition de deux notes n’est pas susceptible, en tant que tel, de transmettre un message dont les consommateurs peuvent se souvenir en sorte que ces certains ne le considéreront pas comme une marque, à moins qu’il n’ait acquis un caractère distinctif par l’usage. Ainsi, la marque demandée ne sera pas perçue par le public pertinent que comme une simple fonctionnalité des produits et services visés et non pas comme une indication de leur origine commerciale.
Finalement, en l’espèce, la demande de marque sonore a échoué à remplir la condition de caractère distinctif car, assimilée à une sonnerie standard dont est doté tout appareil électronique équipé d’une minuterie ou tout appareil de téléphonie.
Voici donc l’occasion de rappeler qu’une diversité de signes faisant appel à différents sens, peut constituer une arque mais qu’ils doivent, comme les signes plus traditionnels, présenter un caractère distinctif pour faire l’objet de droits.
A rapprocher : Règlement (CE) n°207/2009 du 26 février 2009