Cass. civ. 1ère, 3 novembre 2016, n°15-20.495
Une mesure d’instruction ordonnée en France fait obstacle à l’application des dispositions relatives au secret professionnel et au secret des affaires prévues par une loi américaine.
Ce qu’il faut retenir : Une mesure d’instruction ordonnée en France fait obstacle à l’application des dispositions relatives au secret professionnel et au secret des affaires prévues par une loi américaine.
Pour approfondir : Dans l’affaire en cause, la société Metabyte dont le siège social est aux Etats-Unis avait saisi par voie de requête le Président du Tribunal de commerce de Nanterre d’une demande relative à une mesure d’instruction. Cette mesure sollicitée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile permet de réunir des preuves de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige et ce avant tout procès.
Cette demande portait ainsi sur la remise de documents sur support informatique appartenant aux sociétés du groupe Technicolor parties à l’instance qui refusaient de communiquer les documents et les plaçaient sous séquestre. Suite à ce désaccord une procédure a été engagée entre les deux parties.
Tant les juges du fond que ceux de la cour d’appel ont fait droit aux demandes de communication des documents initiées par la société Metabyte. Les sociétés Technicolor ont formé un pourvoi en cassation en invoquant une violation des règles d’ordre public en droit américain instaurant le secret professionnel et un privilège de confidentialité (« legal privilege »).
Cette loi permet de déclarer qu’une mesure d’instruction n’est pas légalement admissible lorsque se présente une situation où la confidentialité des correspondances entre conseils internes et externes est violée.
De plus, à leur sens la mise sous séquestre des documents confidentiels jusqu’au procès permet de préserver les intérêts des parties et de prévenir une éventuelle atteinte au secret professionnel protégé par la loi américaine. Dans cette affaire, plusieurs points retiennent notre attention.
Concernant la loi applicable :
La première chambre civile de la cour de cassation affirme que la loi française est applicable dans la mesure où la mise en œuvre des mesures d’instructions a été formée sur le territoire français.
Par conséquent, les dispositions du code de procédure civile sont applicables. Ainsi les mesures d’instructions sollicitées par la société Metabyte qui s’analysaient en des mesures de constatation, sont légalement admissibles puisqu’elles sont conformes à ces dispositions (article 249 du code de procédure civile) selon la Cour.
Concernant l’absence d’atteinte à la confidentialité des correspondances :
Par ailleurs, la Cour de cassation estime qu’il n’y avait pas non plus d’atteinte au secret des correspondances entre avocats ou entre un avocat et son client.
Les documents litigieux avaient été échangés par des juristes qui n’avaient pas la qualité d’avocat au sens du droit français.
La Cour de cassation fait ainsi dans cette espèce une application stricte des textes nationaux et relève l’absence d’atteinte quant à la confidentialité des correspondances.
Concernant l’articulation des dispositions de l’article 145 du code procédure civile avec le secret professionnel à l’étranger :
Le secret des affaires et le secret professionnel tels que prévus par la loi américaine ne constituent pas en eux-mêmes un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile.
La seule réserve à la communication des documents séquestrés tient au respect du secret des correspondances entre avocats ou entre un avocat et son client édicté par la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.
A rapprocher : Cass, civ 1ère, 3 novembre 2016, n°15-20.495