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D’après l’ancien article 1131 du Code civil, l’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. De cette proposition, l’on tire que la cause dans un contrat doit exister et être licite, sachant que la cause est différemment appréciée suivant que l’on s’intéresse à son existence ou à sa licéité.
D’après l’ancien article 1131 du Code civil, « L’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. ». De cette disposition l’on tire que la cause dans un contrat doit exister et être licite, sachant que la cause est différemment appréciée suivant que l’on s’intéresse à son existence ou à sa licéité.
On envisagera ici l’exigence d’une cause existante, sa licéité ne posant pas de difficulté en droit de la distribution. Dans les actes à titre onéreux (non gratuits) et commutatifs (non aléatoires), ce que sont les contrats de distribution, la cause désigne la contrepartie convenue. En général, cette contrepartie réside dans les obligations assumées par l’autre : ainsi les obligations du franchisé trouvent leur cause dans les obligations du franchiseur, et réciproquement.
La jurisprudence considère que la cause existe lorsqu’elle n’est pas dérisoire : il suffit de mettre en balance les obligations et de regarder si celles assumées par l’une des parties n’apparaissent pas dérisoires.
Illustrations (Contrat d’approvisionnement) : Com. 14 octobre 1997, pourvoi n° 95-14285 : « au regard de l’engagement souscrit par le distributeur, qui consistait à s’approvisionner exclusivement et pendant cinq ans auprès de son fournisseur, l’engagement pris par ce dernier d’obtenir un prêt au profit de son contractant et le cautionner, est dérisoire ; le contrat est donc nul pour absence de cause ; Com. 8 février 2005, B. 21 : l’engagement pris par un fournisseur, en contrepartie d’un engagement d’approvisionnement exclusif, de cautionner à concurrence de 20% un prêt conclu par son cocontractant, était dérisoire et le contrat était donc nul pour absence de cause ; Com. 11 mars 2014, pourvoi n°12-29820 : Un engagement d’approvisionnement pendant 7 ans de 38 000 euros par an été jugé suffisamment causé par la mise à disposition d’un matériel de 6000 euros… Cela apparaît pourtant bien peu au regard de la jurisprudence passée qui a annulé de nombreux contrats qui comportaient non seulement une telle mise à disposition, mais aussi des cautions bancaires. La Cour de cassation exerce cependant un contrôle.
Illustrations (Contrat de franchise) : d’après l’article L. 330-3 C. com., « lorsque le versement d’une somme est exigé préalablement à la signature du contrat, notamment pour obtenir la réservation d’une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit, ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit ». Faute de pouvoir justifier de contrepartie, le franchiseur doit restituer ces sommes indues (CA Versailles, 11 février 2016, RG n° 14/00757).
Le Code civil ne fait que sanctionner le défaut de cause ou la cause dérisoire des obligations assumées par une partie dans un contrat ; il ne sanctionne pas la cause insuffisante. C’est que la lésion, qui désigne le déséquilibre entre les prestations fournies par chacun des contractants dans un contrat onéreux, n’est pas en principe sanctionnée en droit français : « la lésion ne vicie les conventions que dans certains contrats ou à l’égard de certaines personnes » (ancien art. 1118 C. civ.). Les codificateurs ont en effet estimé que les contractants sont les mieux à même d’apprécier les conditions auxquelles ils contractent.
On a assisté un temps à ce que l’on a appelé la subjectivisation de la cause : la jurisprudence appréciait l’existence de la cause dans un contrat en tenant compte non plus seulement de la contrepartie (cause objective), mais aussi des mobiles des parties (cause subjective). Dans un arrêt remarqué, la Cour de cassation a admis qu’un contrat de location de vidéo cassettes devait être annulé pour défaut de cause si les habitants n’étaient pas assez nombreux (Civ. 1ère, 3 juillet 1996, B. 286) : la Cour relève en effet que « l’exécution du contrat selon l’économie voulue par les parties étant impossible, était ainsi constaté le défaut de toute contrepartie réelle à l’obligation de payer le prix de location des cassettes-vidéo »).
Cette solution est dangereuse car elle signifie que dès que le mobile contractuel a été porté à la connaissance de l’autre partie, le contrat pourra être annulé s’il n’est pas économiquement viable. Cet arrêt est néanmoins isolé (v. depuis Com. 27 mars 2007, pourvoi n°06-10452 et Com. 9 juin 2009, pourvoi n°08-11420). L’instrument de contrôle de l’existence de la cause reste la cause objective.
NB : Réforme du droit des contrats. – On retrouve des exigences similaires au droit ancien dans la réforme, encore que la notion de cause ait disparu. Nouvel art. 1168 C. civ. : « Dans les contrats synallagmatiques, le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement. ». Nouvel art. 1169 C. civ. : « Un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire. ».