CJUE, 17 octobre 2017, aff. C-194/16
Une entreprise dont les droits de la personnalité ont été violés par la publication de données inexactes sur Internet et la non-suppression de commentaires la concernant peut former, […] un recours tendant à la rectification de ces données, à la suppression de ces commentaires et à la réparation de l’intégralité du préjudice en résultant.
Ce qu’il faut retenir : Une entreprise dont les droits de la personnalité ont été violés par la publication de données inexactes sur Internet et la non-suppression de commentaires la concernant peut former, devant les juridictions de l’État membre dans lequel se trouve le « centre de ses intérêts », un recours tendant à la rectification de ces données, à la suppression de ces commentaires et à la réparation de l’intégralité du préjudice en résultant.
Pour approfondir : La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait été saisie par une juridiction estonienne par suite d’un litige opposant une entreprise de ce pays, réalisant l’essentiel de ses activités en Suède, à une fédération patronale suédoise, au sujet de demandes de rectification de données prétendument inexactes diffusées sur le site internet de cette dernière, de suppression de commentaires y relatifs formulés dans un forum de discussion intégré à ce site, et d’indemnisation du préjudice prétendument subi.
Par l’arrêt commenté (CJUE, 17 oct. 2017, aff. C-194/16), la CJUE retient qu’une entreprise dont les droits de la personnalité ont été violés, en l’espèce par la publication de données inexactes sur Internet et par la non-suppression de commentaires la concernant, peut former un recours tendant à la rectification de ces données, à la suppression de ces commentaires et à la réparation de l’intégralité du préjudice devant les juridictions de l’État membre dans lequel se trouve le centre de ses intérêts. Ce faisant, la CJUE adopte une solution identique à celle préconisée par l’avocat général, qui avait considéré que le « centre des intérêts » doit être considéré comme l’unique critère de compétence territoriale en cas d’atteinte à la réputation d’une personne morale sur Internet. La CJUE indique que lorsque la personne morale concernée exerce la majeure partie de ses activités dans un État membre autre que celui de son siège statutaire, cette personne morale peut attraire l’auteur de l’atteinte en cause dans cet autre État membre.
La CJUE précise en outre qu’une demande visant à la rectification des données et à la suppression des commentaires mis en ligne est une et indivisible et ne peut, dès lors, être portée que devant une juridiction compétente pour connaître de l’intégralité d’une demande de réparation du dommage, et non devant une juridiction qui n’a pas une telle compétence ; cette solution s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence Shevill (CJUE, 7 mars 1995, aff. C-68/93, Shevill, Points 25, 26 et 32), eDate Advertising GmbH (CJUE, 25 oct. 2011, aff. C-509/09, eDate Advertising GmbH ; v. aussi, aff. C-161/10, MGN Limited, Points 42 et 48). La CJUE retient en conséquence qu’une personne qui prétend que ses droits de la personnalité ont été violés par la publication de données inexactes la concernant sur Internet et par la non-suppression de commentaires à son égard ne peut pas, devant les juridictions de chaque État membre sur le territoire duquel les informations publiées sur Internet sont (ou étaient) accessibles, former un recours tendant à la rectification de ces données et à la suppression de ces commentaires.
A rapprocher : CJUE, 25 oct. 2011, aff. C-509/09 ; CJUE, 7 mars 1995, aff. C-68/93