Cass. com., 13 septembre 2017, n°16-12.978
Une contestation sur le prix de cession des droits sociaux ayant eu lieu antérieurement à la réforme laisse l’expert libre de déterminer […] la valeur des droits sociaux litigieux.
Ce qu’il faut retenir : Les dispositions de l’article 1843-4 du Code civil issues de l’ordonnance du 31 juillet 2014 ne sont pas d’application immédiate. Ainsi, une contestation sur le prix de cession des droits sociaux ayant eu lieu antérieurement à la réforme laisse l’expert libre de déterminer selon « les critères qu’il jugeait appropriés à l’espèce, et sans être lié par la convention ou les directives des parties » la valeur des droits sociaux litigieux.
Pour approfondir : Un associé d’une société civile s’est vu exclure aux termes d’une décision d’assemblée générale en date du 24 mai 2005, laquelle a également fixé la valeur unitaire de ses parts sociales. L’associé contestant l’évaluation a obtenu en justice la désignation d’un expert aux fins de fixation de la valeur de ses droits sociaux. L’expert ayant rendu son rapport le 25 février 2011, l’associé a alors assigné la société en remboursement de ses parts sur la base de la valeur déterminée à l’issue de la procédure expertale.
Le rapport de l’expert est annulé par la Cour d’appel de Paris au motif que la valeur attribuée aux parts sociales par l’expert est différente de celle fixée par les statuts, l’expert ayant ainsi commis une erreur grossière d’appréciation.
L’arrêt rendu en date du 13 septembre 2017 par la chambre commerciale vient préciser l’application dans le temps des nouvelles dispositions de l’article 1843-4 du Code civil. La Haute Cour casse partiellement l’arrêt de la Cour d’appel au visa de l’article 1843-4 dans sa rédaction applicable avant l’ordonnance, au motif qu’ « il appartenait à l’expert de déterminer lui-même, selon les critères qu’il jugeait appropriés à l’espèce, et sans être lié par la convention ou les directives des parties, la valeur des droits sociaux litigieux ».
L’article 1843-4 permet, dans certaines circonstances, de s’affranchir des canons du droit civil concernant la négociabilité du prix de cession des parts sociales en laissant le soin à un expert de le déterminer. Profondément bouleversée par l’ordonnance du 31 juillet 2014, la procédure expertale est désormais encadrée strictement et demeure sujette à de nombreuses critiques, aussi bien d’universitaires que de praticiens.
L’arrêt étudié permet d’illustrer certains défauts du régime post-ordonnance. Ainsi, le régime post-ordonnance est créateur de situations pouvant être parfois délicates : dans l’hypothèse d’un rachat consécutif à un refus d’agrément, on peut imaginer qu’une règle de détermination du prix soit adoptée à la majorité qualifiée des associés tout comme une clause d’agrément de sorte que l’associé minoritaire puisse se voir imposer à la fois l’agrément et la règle d’évaluation dont il ne pourra pas déroger en sollicitant la procédure expertale, l’expert devant se borner à appliquer la méthode de calcul définie par les majoritaires.
Il ne reste alors au minoritaire qu’à soulever un abus de majorité dont la caractérisation est toujours aussi ténue (décision des majoritaires contraire à l’intérêt social et prise dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des autres associés).
A rapprocher : Ordonnance du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés