Cass. com., 10 janvier 2018, n°16-20.764
La notification de la contestation d’une créance adressée non pas à l’agent comptable compétent pour déclarer les créances mais à l’établissement public en sa qualité de créancier fait courir le délai de 30 jours dont dispose le créancier pour répondre à la lettre de contestation.
Ce qu’il faut retenir : La notification de la contestation d’une créance adressée non pas à l’agent comptable compétent pour déclarer les créances mais à l’établissement public en sa qualité de créancier fait courir le délai de 30 jours dont dispose le créancier pour répondre à la lettre de contestation.
Pour approfondir : En l’espèce, la société V. M. a été placée en redressement puis liquidation judiciaires les 26 juillet et 11 septembre 2012. L’agent comptable d’un établissement public à caractère administratif a déclaré une créance auprès du liquidateur. Cette créance a fait l’objet d’une contestation par le liquidateur. La lettre de contestation a été notifiée à l’établissement public. Faute de réponse du créancier à la lettre de contestation dans le délai de trente jours, le juge-commissaire a rejeté la créance.
L’établissement public a formé un recours contre l’ordonnance du juge-commissaire en arguant que ni la lettre de contestation, ni l’ordonnance du juge-commissaire n’avaient été notifiées à l’agent comptable, seul compétent pour déclarer les créances. Le délai de trente jours n’aurait alors donc pas commencé à courir.
Par un arrêt du 19 mai 2016, la Cour d’appel de Versailles a jugé recevable la demande de l’établissement public et a considéré comme irrégulière la notification à l’établissement et non à l’agent comptable de la lettre de contestation au motif que l’agent comptable est seul habilité à agir en matière de déclaration de créance. Aussi, le délai de trente jours prévu par l’article L.622-27 du Code de commerce n’a pas commencé à courir.
Saisie d’un pourvoi principal formé par le liquidateur et d’un pourvoi incident formé par la société V. M., la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel au visa des articles 665 et 692 du Code de procédure civile, des articles L.622-27 (dans sa version antérieure à l’ordonnance du 12 mars 2014), R.624-1 (dans sa version antérieure au décret du 30 juin 2014) et de l’article L.624-3 du Code de commerce. Selon la Haute juridiction, la Cour d’appel a méconnu ces textes puisque l’envoi de la lettre de contestation à l’établissement public qui avait la qualité de créancier valait avis régulier à celui-ci de l’existence de la contestation.
La Cour de cassation fonde particulièrement sa décision sur l’article R.624-1 alinéa 2 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure au décret du 30 juin 2014 qui dispose, en ces termes, que : « Si une créance autre que celle mentionnée à l’article L.625-1 est discutée, le mandataire judiciaire en avise le créancier ou son mandataire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le délai de trente jours prévu à l’article L.622-27 court à partir de la réception de la lettre. Cette lettre précise l’objet de la discussion, indique le montant de la créance dont l’inscription est proposée et rappelle les dispositions de l’article L.622-27. »
Cette décision applique strictement les articles L.622-27 et R.624-1 alinéa 2 du Code de commerce, dans leurs versions applicables au moment des faits, qui obligent à aviser la personne ayant qualité de créancier ou son mandataire et non la personne compétente pour agir en déclaration de créance. Aussi, la Cour distingue justement la qualité et la compétence.
A rapprocher : Ordonnance n°2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives