Cass. com., 24 janvier 2018, n°16-50.033
Le débiteur dispose d’un droit propre à former un recours contre l’ordonnance du juge-commissaire autorisant le liquidateur judiciaire à signer une transaction ayant notamment pour objet la cession d’un actif dépendant de la liquidation judiciaire.
Ce qu’il faut retenir : Le débiteur dispose d’un droit propre à former un recours contre l’ordonnance du juge-commissaire autorisant le liquidateur judiciaire à signer une transaction ayant notamment pour objet la cession d’un actif dépendant de la liquidation judiciaire.
Pour approfondir : En l’espèce, par ordonnance du 14 mai 2013, le juge-commissaire a autorisé le liquidateur judiciaire à signer un accord transactionnel conclu entre lui et un débiteur de sa société liquidée prévoyant que le débiteur payerait une partie de sa dette en contrepartie de la cession à sa société mère des actions détenues par la société liquidée dans son capital pour le prix d’un euro symbolique et de la renonciation du liquidateur judiciaire à toutes poursuites contre lui au titre du solde de la dette.
Le dirigeant de la société, placée en liquidation judiciaire, forme un recours contre cette ordonnance.
Par un arrêt en date du 24 mars 2016, la Cour d’appel de Versailles déclare recevable le recours formé par le dirigeant au motif que la requête du liquidateur judiciaire concernait une transaction prévoyant la cession, à un tiers, d’actions détenues par la société liquidée.
La société débitrice forme un pourvoi en cassation contre cette décision. Elle soutient, en ces termes, que : « le jugement d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire emporte dessaisissement pour la société de l’administration et de la disposition de ses biens, les droits et les actions concernant son patrimoine étant exercés pendant la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ; qu’il s’ensuit qu’aucun droit propre faisant échec au dessaisissement ne l’autorise à contester l’ordonnance du juge-commissaire autorisant le liquidateur à transiger sur le recouvrement de la créance dont il est titulaire, peu important que cette transaction emporte également cession des droits sociaux qu’il détient dans le capital de son débiteur au prix d’un euro symbolique ».
Par un arrêt du 24 janvier 2018, publié au bulletin, la Cour de cassation rejette le moyen au motif que le débiteur dispose d’un droit propre à former un recours contre l’ordonnance autorisant le liquidateur judiciaire à signer une transaction ayant pour objet la cession d’un actif dépendant de la liquidation judiciaire. Selon les dispositions de l’article L.641-9 du Code de commerce, le jugement, qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire, emporte de plein droit dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens. Les droits et les actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur judiciaire. A l’inverse, les droits extrapatrimoniaux du débiteur sont exercés par ce dernier. Par un arrêt du 16 octobre 2001 (Cass. com., 16 octobre 2001, n°98-18.860), la Cour de cassation avait déjà décidé que les transactions portant sur toutes les contestations, qui intéressent collectivement les créanciers, appartenaient à la catégorie des droits et actions du débiteur concernant son patrimoine de sorte que le débiteur était irrecevable à contester l’ordonnance du juge-commissaire autorisant le liquidateur judiciaire à transiger.
En parallèle, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la réalisation des actifs en liquidation judiciaire, le débiteur dispose d’un droit propre pour faire appel de l’ordonnance du juge-commissaire et se pourvoir en cassation (Cass. com., 11 oct. 2016, n°14-22.796, Cass. com., 17 févr. 2015, n° 14-10.100 et 14-10.109, Cass. com., 8 juill. 2014, n° 13-19.395).
La Cour de cassation opère donc à la synthèse de ces deux jurisprudences et décide que le recours du débiteur constitue un droit propre lorsqu’il porte contre une ordonnance du juge-commissaire autorisant une transaction prévoyant notamment la cession d’un actif dépendant de la liquidation judiciaire.
Il convient donc de veiller à l’objet de la transaction afin de déterminer la recevabilité du débiteur à former un recours contre une ordonnance du juge-commissaire autorisant le liquidateur judiciaire à transiger.
A rapprocher : Cass. com., 16 octobre 2001, n°98-18.860 ; L.641-9 du Code de commerce