CE, 22 février 2018, SAS Udicité, n°389518 ; CE, 6 avril 2018, Association NARTECS, n°402714
Lorsqu’un permis modificatif est produit spontanément en cours d’instance afin de régulariser les vices affectant l’autorisation d’urbanisme initiale, le juge administratif peut prendre en considération ce nouvel acte sans être tenu de surseoir à statuer dès lors qu’il a invité les parties à présenter leurs observations.
Ce qu’il faut retenir : Par deux décisions des 22 février et 6 avril 2018, le Conseil d’Etat précise que lorsqu’un permis modificatif est produit spontanément en cours d’instance afin de régulariser les vices affectant l’autorisation d’urbanisme initiale, le juge administratif peut prendre en considération ce nouvel acte sans être tenu de surseoir à statuer dès lors qu’il a invité les parties à présenter leurs observations. Il appartient alors à la partie qui poursuit l‘annulation de l’autorisation d’urbanisme initiale de contester la légalité du permis modificatif, et ce, par des moyens propres et au motif que ladite autorisation initiale n’était pas régularisable.
Pour approfondir : Par les deux décisions commentées, le Conseil d’Etat est venu préciser les conditions d’application de l’article L.600-5-1 du Code de l’urbanisme permettant la régularisation en cours d’instance, de permis de construire, de démolir ou d’aménager.
Dans la première affaire (CE, 22 février 2018, SAS Udicité, n°389518), un permis avait été délivré le 28 avril 2010 pour la construction d’un bâtiment universitaire dans le périmètre d’une zone d’aménagement concertée. Attaqué par plusieurs associations et particuliers, ledit permis a été annulé par le tribunal par un jugement rendu le 2 juillet 2013. A seule fin de tirer les conséquences dudit jugement, un permis modificatif a été délivré le 23 décembre 2013. Par un arrêt du 16 février 2015, la Cour administrative d’appel a rejeté les appels formés par le pétitionnaire et par le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche en considérant, d’une part, que la délivrance d’un tel permis modificatif n’était, par principe, pas susceptible de régulariser les illégalités affectant le permis initial et, d’autre part, que sa production spontanée par l’Administration faisait obstacle aux conclusions du pétitionnaire sur le fondement de l’article L.600-5-1 du Code de l’urbanisme.
Le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel et a, en premier lieu, admis qu’en cas d’intervention spontanée en cours d’instance, d’une décision de régularisation de l’autorisation d’urbanisme initiale, le juge peut apprécier ce nouvel acte sans être tenu de surseoir à statuer, dès lors qu’il a préalablement invité les parties à présenter leurs observations. En second lieu, la Haute juridiction confirme que le juge administratif peut faire application des pouvoirs qu’il tient de l’article L.600-5-1 du Code de l’urbanisme, de sa propre initiative ou à la demande des parties, pour la première fois en appel et alors même que l’autorisation d’urbanisme en cause a été annulée par les premiers juges. Il en résulte qu’un permis modificatif délivré pendant l’instruction de la procédure d’appel est susceptible de permettre la régularisation d’une illégalité retenue par les juges de première instance.
Il s’agit d’une application aux autorisations individuelles de la décision de section Commune de Sempy (CE, 22 décembre 2017, n°395963) rendue dans le cadre de l’application de l’article L.600-9 du Code de l’urbanisme concernant la régularisation, en cours d’instance, des documents d’urbanisme.
Dans la seconde affaire (CE, 6 avril 2018, Association Nature, aménagement réfléchi, territoire, environnement, culture sauvegardés – NARTECS – n° 402714), la Haute juridiction procède à une mise au point. Lorsque le permis modificatif est délivré au cours de l’instance d’appel, il est possible d’en solliciter l’annulation pour la première fois en appel. Il appartient alors à la partie poursuivant l’annulation de l’autorisation d’urbanisme initiale de contester la légalité du permis modificatif ainsi produit, par des motifs propres et au motif que l’autorisation d’urbanisme initiale ne pouvait donner lieu à régularisation.
A rapprocher : CE, 22 décembre 2017, Commune de Sempy, n°395963 ; CE, 19 juin 2017, Syndicat des copropriétaires de la résidence Butte Stendhal, n°398531