Cass. com., 13 mars 2019, n°17-20.252
Au visa de l’article 126 alinéa 2 du Code de procédure civile, les juges du Quai de l’Horloge estiment que la fin de non-recevoir tirée de l’absence de droit d’agir d’une société absorbée peut être écartée. La régularisation n’est possible qu’à la double condition que, d’une part, la fusion-absorption se réalise au cours de la procédure contre l’absorbée et que, d’autre part, l’absorbante intervienne à l’instance au lieu et place de l’absorbée, cette dernière étant dépourvue de personnalité juridique du fait de la fusion.
A la suite de la vente d’une maison d’habitation en 2009 par la société Laviclem au profit de la SCI Deseo, des désordres affectant le bien sont rapportés, de sorte que la SCI Deseo a assigné la société Laviclem le 24 novembre 2011. Puis à la suite de la réunion des parts en une seule main le 30 novembre 2011, la société Laviclem est dissoute puis radiée en avril 2012 par voie de transmission universelle du patrimoine au profit de l’associé unique personne morale, à savoir la société Clémenceau. Le 4 août 2016, la demanderesse assigne en intervention forcée l’absorbante aux cotés de l’absorbée.
Avec cet arrêt, il n’y a définitivement plus à remettre en question le régime de l’article 236-3 du Code de commerce qui prévoit, pour rappel, la dissolution sans liquidation de la société absorbée et la transmission universelle du patrimoine à la société bénéficiaire de la fusion. L’absorbante devenant ayant-cause universel de l’absorbée à la date de la fusion, lui conférant de facto la qualité de partie aux instances antérieurement engagées par ou contre l’absorbée.
En l’espèce, la Cour de cassation s’emploie à réaliser un raisonnement en deux temps.
Tout d’abord, les Hauts Magistrats, dans la lignée des juges du fond, rappellent que l’absorbée étant dépourvue de personnalité morale, celle-ci ne peut
relever appel et l’intervention en cours d’instance de l’absorbante ne peut couvrir l’irrégularité de la procédure découlant du défaut de capacité. Ici, la Cour de cassation vient sanctionner la méconnaissance d’un principe pourtant inhérent à la fusion, à savoir la transmission universelle de patrimoine. L’intervention, qu’elle soit forcée ou non, ne change rien : celle-ci n’a pas pour effet de couvrir le défaut de personnalité morale de l’absorbée déjà radiée.
Également, la Haute juridiction vient casser partiellement l’arrêt de la cour d’appel au visa de l’article 126 alinéa 2 du Code de procédure civile. En effet, dès lors qu’une personne ayant qualité pour agir intervient à l’instance, l’irrégularité due au défaut de personnalité morale de l’absorbée est écartée. En l’occurrence, la société Clémenceau n’avait cependant pas été appelée à la cause au lieu et place de la société absorbée, mais seulement en intervention forcée.
Les juges ont fait application de la jurisprudence constante dégagée par la Cour de cassation, en réaffirmant le principe selon lequel la transmission universelle du patrimoine de l’absorbée vers l’absorbante permet à cette dernière d’acquérir de plein droit la qualité de partie à l’instance qui engageait antérieurement l’absorbée.
A rapprocher : Cass. soc., 22 septembre 2015, n°13-25.429 ; Cass. com., 21 octobre 2008, n°07-19.102 ; Article L.236-3 Code de commerce ; Article 126 Code de procédure civile