Cass. civ. 1ère, 22 mai 2019, n°18-16.150
La demande de résolution du crédit doit être rejetée dès lors que les emprunteurs ne subissent aucun préjudice consécutif au versement des fonds par le prêt lors de la délivrance des fonds.
Suite à un démarchage à domicile, M. et Mme. F. ont acquis, suivant un bon de commande du 10 septembre 2012, auprès de la société R., des panneaux photovoltaïques, un kit éolien et l’isolation des combles de leur habitation, pour un montant de 56.400 euros financé par un contrat de crédit affecté souscrit le même jour auprès de la société F. Les emprunteurs ont assigné le prêteur en résolution du contrat de prêt au motif que l’attestation de fin de travaux comportait des réserves et que les fonds avaient été débloqués en vertu d’une attestation dont ils n’étaient pas signataires. Le prêteur a, quant à lui, assigné les emprunteurs en remboursement de sa créance.
La cour d’appel d’Orléans, dans un arrêt du 15 mars 2018, a fait droit à la demande du prêteur et rejeté celles des emprunteurs.
Ces derniers ont donc formé un pourvoi en cassation en soutenant :
- d’une part, que la faute commise par l’établissement de crédit lors de la libération des fonds l’empêcherait d’obtenir le remboursement du capital emprunté, peu important que l’emprunteur n’ait subi aucun préjudice ;
- d’autre part, qu’une telle faute exclurait toute restitution du capital même en l’absence d’annulation du contrat principal.
Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation rejette le pourvoi aux motifs que le contrat de vente avait été correctement exécuté et non annulé, et que les emprunteurs ne contestaient pas bénéficier des travaux d’isolation des combles et d’une installation en parfait état de marche. La cour en déduit ainsi que les emprunteurs n’avaient subi aucun préjudice consécutif au versement des fonds par le prêteur sur la foi d’une attestation portant une signature litigieuse.
Cet arrêt apporte ainsi une réponse utile à un contentieux récurrent initié par les emprunteurs qui invoquent fréquemment une mauvaise exécution du contrat principal afin d’obtenir la résolution du prêt.
Pour rappel, le crédit affecté est le contrat qui est destiné à financer l’achat d’un bien ou une prestation de services. Le contrat de crédit et le contrat principal sont alors interdépendants. Or, du fait de cette interdépendance, le crédit affecté est conclu sous la condition suspensive de la livraison du bien mais également sous la condition résolutoire de la validité du contrat principal. Ainsi, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison de la marchandise ou de l’exécution de la prestation (art. L. 312-48 du Code de la consommation) et le contrat de prêt « est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé » (art. L. 312-55 du Code de la consommation).
En l’espèce, deux difficultés se présentaient :
- l’absence d’annulation du contrat principal : la Cour de cassation considère toutefois que l’absence d’action en annulation ou en résolution du contrat principal n’interdit pas à l’emprunteur de se prévaloir des dispositions de l’article L. 312-48 du code de la consommation (Cass. civ. 1ère, 19 févr. 2014, n° 12-26.100) ;
- l’absence de préjudice subi par les emprunteurs : c’est ce deuxième élément qui amène finalement le juge à rejeter le pourvoi et à condamner les emprunteurs à restituer le capital versé au prêteur, et ce, malgré l’irrégularité de l’attestation.
A rapprocher : Article L. 312-48 du Code de la consommation ; Article L. 312-55 du Code de la consommation