Cass. com., 2 décembre 2020, n°18-21.597
L’administration fiscale ne peut invoquer l’inopposabilité de la démission non publiée d’un dirigeant pour rechercher sa responsabilité, sauf à démontrer une gestion de fait de ce dernier.
Le gérant d’une société a démissionné de ses fonctions le 29 juin 2011 et son successeur n’a pas procédé aux formalités de publicité légale nécessaires auprès du registre du commerce et des sociétés.
La société a ensuite fait l’objet d’un contrôle fiscal et plusieurs avis de mise en recouvrement sont demeurés impayés à ce titre. L’administration fiscale assigne alors le gérant démissionnaire, qui figure toujours sur l’extrait Kbis, en vue de le déclarer solidairement responsable du paiement des dettes fiscales de la société, sur le fondement de l’article L.267 du Livre des procédures fiscales.
Aux termes de ce texte, le dirigeant d’une société, qui est responsable de manœuvres frauduleuses ou de l’inobservation grave et répétée d’obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement d’impositions ou de pénalités dues par la société, peut être déclaré solidairement tenu au paiement de celles-ci.
La cour d’appel de Paris déclare le gérant démissionnaire tenu solidairement au paiement des sommes réclamées par l’administration fiscale, après avoir relevé que sa démission n’ayant pas fait l’objet d’une publicité légale, il était demeuré gérant de droit aux yeux des tiers.
La Cour de cassation casse l’arrêt au motif que si une société ne peut se prévaloir, à l’égard des tiers, des nominations et cessations de fonction des dirigeants tant qu’elles n’ont pas été régulièrement publiées, cette inopposabilité ne peut être invoquée en ce qui concerne les faits et actes mettant en jeu la responsabilité personnelle d’un dirigeant sur le fondement de l’article L.267 du Livre des procédures fiscales.
Dès lors, selon la chambre commerciale, les fonctions de dirigeant ayant pris fin par l’effet de la démission, et ce malgré l’absence de publicité légale, il appartenait à l’administration fiscale de démontrer que le dirigeant incriminé exerçait une direction de fait de la société.
S’il est vrai que les textes disposent que la démission ou la nomination d’un dirigeant n’est opposable aux tiers qu’après l’accomplissement régulier des formalités de publicité, la Haute Cour nous rappelle utilement que le défaut de publication n’a aucune incidence en matière de responsabilité.
Cette solution s’inscrit dans la lignée de précédentes décisions rendues en matière d’insuffisance d’actif (Cass. com., 14 octobre 1997, no95-15.384) ainsi qu’en matière fiscale (Cass. com., 17 janvier 1989, no86-19.252).
A rapprocher : Article L.210-9 du Code de commerce ; Article L.267 du Livre des procédures fiscales ; Cass. com., 14 octobre 1997, n°95-15.384 ; Cass. com., 17 janvier 1989, n°86-19.252