L’affaire qui a opposé la société CHATTAWAK, qui dirige le réseau du même nom, à son affilié d’Annecy défraye la chronique depuis plusieurs années.
L’affaire qui a opposé la société CHATTAWAK, qui dirige le réseau du même nom, à son affilié d’Annecy défraye la chronique depuis plusieurs années. Au-delà de l’espèce considérée, c’est la viabilité de la commission-affiliation elle-même qui paraissait être en jeu, tant les critères retenus par la Cour d’appel de Paris pour qualifier le contrat en cause de contrat d’agence commerciale paraissaient-ils remplis quasi-systématiquement par les contrats de commission-affiliation.
L’enjeu réside dans l’indemnité dont bénéficie l’agent commercial en cas de rupture de son contrat, qui se serait élevée en l’espèce à 145.000 euros.
Le 29 juin 2010, la chambre commerciale de la Cour de cassation a mis fin aux inquiétudes des têtes de réseaux de commission-affiliation en consacrant l’originalité du statut du commissionnaire-affilié par rapport à celui d’agent commercial. Cet arrêt constitue la dernière en date des quatre étapes de l’affaire CHATTAWAK, qui seront rappelées brièvement ci-après.
1ère étape (CA Paris, 13 septembre 2006, Juris-Data n°312382) : la Cour d’appel de Paris, confirmant le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 6 février 2004, considère que l’affilié a agi non seulement pour le compte de la société CHATTAWAK, mais également au nom de cette dernière et était par conséquent l’agent commercial de CHATTAWAK. Pour fonder sa décision, la Cour d’appel relevait que plusieurs interlocuteurs s’adressaient à l’affilié sous la dénomination « CHATTAWAK ».
2ème étape (Cass. com., 26 février 2008, pourvoi n°06-20.772) : la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, au motif que le contrat stipulait que l’affilié était « un commerçant indépendant propriétaire de son fonds de commerce », alors que l’agent commercial, simple mandataire qui n’a au demeurant pas de clientèle propre, ne peut logiquement être titulaire d’un fonds de commerce et n’a pas la qualité de commerçant.
3ème étape (CA Paris, 9 avril 2009, Juris-Data de renvoi, s’attache à démontrer que le commissionnaire-affilié n’était pas, dans la réalité des faits, propriétaire du fonds de commerce, estimant que la tête de réseau possédait ou contrôlait les éléments essentiels du fonds de commerce. Pour ce faire, la Cour :
– estime que le fait que l’affilié ait pu céder son bail commercial n’est pas un élément essentiel du litige ;
– reprend les arguments de l’arrêt du 13 septembre 2006 pour conclure que l’affilié agissait au nom et pour le compte de la tête de réseau ;
– indique que l’influence de l’affilié sur la clientèle locale est difficile à cerner ; elle indique cependant que la clientèle est détachable de la marque.
4ème étape : l’arrêt commenté casse l’arrêt de la Cour d’appel, sur chacun des motifs précités :
– le fait que l’affilié ait été titulaire d’un bail commercial est, contrairement à ce qu’a prétendu la Cour d’appel, un élément essentiel pour déterminer si l’affilié avait la qualité de commerçant ;
– la Cour d’appel ne pouvait considérer que l’affilié contractait au nom de la tête de réseau sans rechercher laquelle des sociétés avait la qualité juridique de vendeur ;
– l’agent commercial n’ayant pas de clientèle propre, la cour d’appel ne pouvait qualifier l’affilié d’agent commercial tout en constatant qu’il avait une telle clientèle.
L’affaire est renvoyée devant la Cour d’appel de Paris autrement composée. Le débat semble néanmoins clos, comme le laisse augurer l’arrêt rendu le 16 décembre 2010 par la Cour d’appel de Pau (R.G. n°09/03594) qui, après avoir constaté que le commissionnaire-affilié était propriétaire de son fonds de commerce, a rejeté en conséquence la qualification d’agent commercial.