CA Nîmes, 19 mai 2016, n°15/01128
Les juridictions du fond commettent parfois un véritable contresens sur la portée de l’intuitu personae ou de l’absence d’intuitu personae attachée à tel contrat ; ainsi, retiennent-elles à tort (notamment) que les dispositions d’un contrat de franchise conclu en considération de la seule personne du franchisé, donc sans réciproque, permettait d’opposer au franchisé des opérations de cession portant sur la personne du franchiseur.
La Cour d’appel de Nîmes (CA Nîmes, 19 mai 2016, n°15/01128) a déjà considéré que les dispositions d’un contrat de franchise conclu en considération de la personne du franchisé, sans réciproque (le contrat n’étant pas conclu en considération de la personne du franchiseur) permettaient d’opposer au franchisé des opérations de cession portant sur la personne du franchiseur ; on peut difficilement faire plus inexact :
« La Sarl Lolie oppose une fin de non-recevoir tiré du défaut de qualité à agir de la société Fromentiers Magasins, en soutenant que le contrat de franchise est un contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties, et est par nature un contrat intuitu personae et ne peut donc être transmis par fusion absorption ou dans le cadre d’un apport partiel d’actifs, sauf accord préalable du franchisé. Elle prétend donc qu’à défaut d’un tel accord et compte tenu des conséquences juridiques de la dissolution sans liquidation de la société Fromenterie, la société Fromentiers Magasins est irrecevable à agir, sur la base du contrat de franchise, ledit contrat n’ayant pu être transmis. (…)
Le contrat de franchise stipule en son article 14 que le contrat est conclu « intuitu personae » mais que cet « intuitu personae » n’est pas réciproque et s’applique uniquement au franchisé et qu’en conséquence, « les modifications qui pourraient intervenir dans la personne du franchiseur, telles que fusion, scission, absorption, apport partiel d’actifs, cession, transfert à une filiale ou tout autre accord juridique ou commerciale avec un tiers, seraient sans effet sur l’existence et/ou l’exécution des présentes ».
Ces dispositions qui s’imposent aux parties rendent inopérante l’argumentation développée par la Sarl Lolie.
La société Fromentiers Magasins qui vient aux droits de la société Fromenterie, de façon régulière, justifie donc de sa qualité à agir. Le tribunal a justement rejeté le moyen tiré de l’irrecevabilité des demandes ».
Ici, dans cette motivation, le terme « en conséquence » est malvenu. Il est faux de dire en effet que l’absence d’intuitu personae est « sans effet » par exemple en cas de disparition de la personne du franchiseur par suite d’une fusion ou d’un apport partiel d’actifs. De là, on ne peut qu’encourager la lecture des articles envisageant cette problématique dans son ensemble.