Cass. com., 31 mars 2015, pourvoi n°14-12.272 Juris-Data n°2015-007283
Ne constitue pas un acte de concurrence déloyale le fait de répondre à une sollicitation spécifique d’un client dès lors que la vente en résultant s’inscrit dans le cadre d’un usage professionnel selon lequel un commerçant peut vendre occasionnellement un produit non distribué par lui et fourni par un confrère.
Dans cette affaire, une société exploitant un fonds de commerce de bijouterie, joaillerie et horlogerie qui distribuait plusieurs marques de montres de luxe, se prévalant des contrats de distribution sélective conclus avec certains fabricants, avait agi :
- d’une part, sur le terrain de la concurrence déloyale à l’encontre d’une société exploitant une bijouterie dans sa zone de chalandise, laquelle proposait à la vente des montres de mêmes marques ;
- et, d’autre part, sur celui de la responsabilité contractuelle à l’encontre de l’un des fabricants de montres concernés.
De son côté, ce fabricant avait demandé, à titre reconventionnel, la résiliation du contrat de distribution sélective qu’il avait conclu avec la société ayant initié l’instance.
Pour écarter le premier moyen objet du pourvoi, la cour de cassation observe que la Cour d’appel a légalement justifié sa décision en constatant successivement que :
- l’exploitant de la bijouterie, qui n’était pas distributeur agréé des marques R… et C…, avait tout au plus vendu une montre de marque C…, en août 2007, et une montre de marque R…, en novembre 2008 ;
- ces ventes n’ont pas été initiées par l’exploitant, lequel ne proposait pas ces marques en vitrine et n’avait fait que répondre à des demandes particulières de clients ;
- ces deux reventes s’inscrivaient donc dans le cadre d’un usage en matière de joaillerie, selon lequel un bijoutier peut vendre occasionnellement un produit non distribué par lui et fourni par un confrère, pour répondre à une demande particulière d’un client ;
- et qu’il n’est pas établi que l’exploitant aurait procédé à d’autres ventes de montres en violation d’accords de distribution sélective.
Selon la Cour de cassation, en l’état de ces constatations et appréciations dont elle a pu déduire qu’aucun acte de concurrence déloyale n’était caractérisé à l’encontre de l’exploitant de la bijouterie, la Cour d’appel a légalement justifié sa décision.
Pour écarter le deuxième moyen objet du pourvoi, la Cour de cassation souligne que la responsabilité d’un fournisseur au titre de l’agrément prétendument fautif d’un nouveau distributeur ne relève pas des dispositions de l’article L. 442-6 I 6° du Code de commerce qui sanctionnent la participation à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou de distribution exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence.
Ce faisant, la Haute juridiction retient que l’arrêt critiqué a pu exactement considérer qu’en agréant l’exploitant de la bijouterie, le fabricant n’a pas violé l’interdiction de revente hors réseau, ni directement ni indirectement, et n’a, dès lors, pas engagé sa responsabilité au titre de ce texte.