Cass. civ. 3ème, 3 décembre 2015, pourvoi n° 14-19.146
La prescription de deux ans de la demande en requalification d’un contrat de location-gérance court à compter de la signature du contrat.
Ce qu’il faut retenir : La prescription de deux ans de la demande en requalification d’un contrat de location-gérance court à compter de la signature du contrat.
Pour approfondir : Compte tenu de la rigidité du statut des baux commerciaux, les propriétaires de locaux commerciaux peuvent être tentés de conclure en lieu et place d’un bail commercial d’autres conventions d’occupation moins réglementées. Parmi ces conventions moins protectrices, il est possible de citer notamment les conventions d’occupation précaires, le bail dérogatoire et les conventions de location gérance.
Dès lors que la convention qui a été conclue viole les dispositions d’ordre public du statut des baux commerciaux, le preneur peut en solliciter la requalification.
Il faut tout de même prendre garde car cette action en requalification est enfermée dans le délai biennal prévu par l’article L. 145-60 du Code de commerce ; ce délai courant à compter de la signature du contrat litigieux.
En l’espèce, l’exploitant d’un local commercial a donné en location-gérance son fonds de commerce. Le contrat litigieux a fait l’objet de plusieurs renouvellements pour enfin être dénoncé par l’exploitant, l’éviction n’étant évidemment pas soumise à indemnité d’éviction. C’est dans ces circonstances que le locataire-gérant a assigné l’exploitant en requalification du contrat de location gérance, au motif qu’il était en réalité un bail commercial en raison de l’inexistence de la clientèle. S’agissant de la prescription, le locataire gérant avait considéré que son action n’était pas prescrite puisqu’elle avait été introduite dans le délai de deux ans suivant la conclusion du contrant renouvelé.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la Cour d’appel de PARIS qui avait jugé l’action introduite par le preneur comme prescrite. En effet, la Haute juridiction réaffirme fermement le principe selon lequel le délai de prescription biennale court à compter de la conclusion du contrat, le renouvellement ne remettant nullement en cause les éléments permettant dès l’origine de solliciter la requalification.
Cette décision pleine de bon sens avait déjà conduit Jean-Pierre BLATTER à affirmer que le « renouvellement du contrat, tacite ou exprès, ne saurait faire revivre une action définitivement prescrite, faute de quoi elle deviendrait par l’effet du renouvellement du contrat imprescriptible, alors pourtant que les motifs de nullité invoqués existent depuis l’origine des relations contractuelles, comme en l’espèce le caractère inexistant de la clientèle. »
Néanmoins, la modification introduite par la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, dite loi Pinel, qui prévoit que les clauses violant le statut des baux commerciaux sont non plus nulles mais réputées non écrites serait susceptible de changer l’analyse. Le législateur allant toujours vers une protection plus accrue du preneur.
A rapprocher : Cass. civ. 3ème, 1er octobre 2014, pourvoi n°13-16.806