CA Dijon, 2ème ch., 8 mars 2018, n°16/01118
Le débiteur de l’obligation dont l’inexécution donne lieu à l’application d’une clause pénale est tenu de rapporter la preuve du caractère « manifestement excessif » de la sanction au regard du préjudice subi par le créancier afin d’obtenir la réduction de son montant.
Ce qu’il faut retenir : Le débiteur de l’obligation dont l’inexécution donne lieu à l’application d’une clause pénale est tenu de rapporter la preuve du caractère « manifestement excessif » de la sanction au regard du préjudice subi par le créancier afin d’obtenir la réduction de son montant. Cette solution s’impose aussi bien sous l’empire de l’article 1152 ancien du Code civil, que depuis l’entrée en vigueur de l’article 1231-5 du même code, issu de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, et de la loi n°2018-287 du 20 avril 2018 ratifiant ladite ordonnance.
Pour approfondir : En l’espèce, un contrat de franchise comportait une clause de non-réaffiliation assortie d’une clause pénale, comme il est d’usage fréquent. Le franchisé sollicitait alors, à titre subsidiaire, la réduction du montant de la clause pénale (v. pour un commentaire récent sur la question : Le nouvel article 1231-5 du Code civil relatif à la clause pénale).
Les juges du fond le déboutent de sa demande dans les termes suivants : « Attendu que la SARL IF… qui sollicite, à titre subsidiaire, la réduction à 1 € de la sanction de l’interdiction de non-réaffiliation constitutive d’une clause pénale, en application de l’article 1152 du Code civil, n’établit pas son caractère manifestement excessif au regard du préjudice subi par le créancier ; Qu’elle sera dès lors condamnée à payer à la société ORPI France la somme de 32 640 € (20 € X l’indice 1632 en vigueur au premier trimestre de l’année 2015) à titre de dommages-intérêts ».
La solution pourrait paraître simple, mais suscite toutefois trois observations.
La première observation – bien connue mais qu’il convient tout de même de rappeler – tient au fait que le caractère « manifestement excessif » du montant de la clause pénale résulte de la comparaison entre, d’une part, le montant consécutif à l’application de la clause pénale et, d’autre part, le « préjudice subi par le créancier ». Cette solution est connue (v. par ex : CA Aix-en-Provence, 26 janvier 2017, Juris-Data n°2017-005968 : soulignant que le caractère manifestement excessif de la clause pénale s’apprécie alors en comparant le montant de la peine conventionnellement fixé et celui du préjudice effectivement subi) et logique.
La deuxième observation – moins connue mais parfaitement fondée en droit – tient au fait que le débiteur de l’obligation (ici une obligation de non-réaffiliation) dont l’inexécution donne lieu à l’application d’une clause pénale est tenu de rapporter la preuve du caractère manifestement excessif de la sanction au regard du préjudice subi par le créancier afin d’obtenir la réduction de son montant. L’application de l’article 9 du CPC justifie cette solution.
La troisième observation – plus problématique – tient au fait que si la charge de la preuve pèse sur le débiteur de l’obligation (cf. paragraphe précédent), il n’en demeure pas moins qu’existe le plus souvent en pratique un débat entre les deux parties contractantes sur le montant du préjudice effectivement subi par le créancier.
A rapprocher : CA Aix-en-Provence, 26 janvier 2017, Juris-Data n°2017-005968