La sous-caution peut se prévaloir de la disproportion de son engagement

CA Amiens, 7 juillet 2016, RG n°14/05361

La sous-caution peut se prévaloir, sur le fondement de l’article L.341-4 du Code de la consommation, de la disproportion de ses engagements envers la caution. Si cette jurisprudence n’était pas encore pleinement établie, et nécessite encore confirmation par la Cour de cassation, l’arrêt commenté vient conforter cette solution.

Ce qu’il faut retenir : La sous-caution peut se prévaloir, sur le fondement de l’article L.341-4 du Code de la consommation, de la disproportion de ses engagements envers la caution. Si cette jurisprudence n’était pas encore pleinement établie, et nécessite encore confirmation par la Cour de cassation, l’arrêt commenté vient conforter cette solution.

Pour approfondir : L’arrêt du 7 juillet 2016 de la Cour d’appel d’Amiens vient ici rappeler que la sous-caution peut se prévaloir de la disproportion de son engagement envers la caution. Cet arrêt vient confirmer un peu plus la jurisprudence retenue par les Cour d’appel de Paris et Nancy (CA Paris, Pôle 5, 6ème ch., 21 mai 2015, n° 12/03599 ; CA Nancy, 26 février 2015, n° 13/03266) … sans toutefois qu’une position établie, validée par la Cour de cassation, ne soit encore confirmée.

En l’espèce, une société souscrit un prêt auprès d’un établissement de crédit, prêt dont une société exerçant une activité de brasseur se porte caution. Parallèlement, deux personnes physiques se portent caution du brasseur. Lorsque l’emprunteuse tombe en redressement puis liquidation judiciaire, la caution se voit demander le remboursement du prêt auprès de la banque. Subrogé dans les droits de l’établissement de crédit, elle se retourne contre ses deux cautions à son tour.

Cautionnement solidaire entre co-obligés, ou relations entre caution et sous-caution, la Cour d’appel d’Amiens vient rappeler la nuance : « le recours de la caution contre la sous-caution est fondée sur la convention conclue entre elles et non sur la représentation mutuelle entre co-obligés, qui ne peut jouer entre la caution et la sous-caution puisque celle-ci n’est pas débiteur du créancier principal ». Quel régime, alors, pour la sous-caution ?

Puisque le contrat entre la caution et la sous-caution est un contrat de cautionnement à part entière, la Cour d’appel vient rappeler qu’en vertu de l’article L.341-4 du Code de la consommation, « un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus ». Or, en l’espèce, puisque c’est dans le cadre de son activité professionnelle que le brasseur est devenu caution, il a bien la qualité de créancier professionnel à l’égard de ses cocontractants : « les moyens tirés du formalisme et des obligations de fond imposés par le code de la consommation lui sont [donc] opposables ». L’article L.341-4 est donc applicable, d’autant que cet article s’applique tant aux cautions profanes qu’aux cautions averties. Puisque l’appelante justifie s’être engagée de façon disproportionnée au regard de ses revenus, et n’avoir pas de patrimoine, la Cour d’appel casse l’arrêt d’instance qui l’avait condamnée à rembourser son créancier. Alors que la Cour d’appel de Lyon considérait la solution inverse, au motif que la caution n’était pas, au moment du sous-cautionnement, réellement créancier – cette qualité ne pouvant lui être octroyée qu’à partir du paiement fait à la banque (CA Lyon, 15 octobre 2015, n° 14/03568), la Cour d’appel d’Amiens lui reconnait cette qualité, et l’applicabilité de l’article L.341-4 du Code de la consommation. La position de la Cour de cassation sur cette question précise doit être attendue. L’arrêt met aussi en lumière les règles régissant, en la matière, la charge de la preuve. Ainsi, s’il appartient à la caution (soit les deux personnes physiques, ici) d’établir son impossibilité de faire face à ses engagements, « la charge de la preuve est inversée dans l’hypothèse où la disproportion est retenue, lorsque la situation patrimoniale de la caution doit être examinée au stade des poursuites ». C’est alors au créancier qu’il revient de prouver que les revenus et/ou patrimoine de sa caution peuvent le désintéresser.

A rapprocher : Article L. 341-4 du Code de la consommation

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