Cass. com., 14 févr. 2018, n°17-11.924
Seul engage la responsabilité de son auteur, sur le fondement de l’article L. 442-6 I 2° du code de commerce, le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.
Ce qu’il faut retenir :
Seul engage la responsabilité de son auteur, sur le fondement de l’article L. 442-6 I 2° du code de commerce, le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.
Pour approfondir :
En l’espèce, la société A, qui distribue des produits et accessoires électroniques, a souscrit un contrat de télésurveillance avec la société B et un contrat d’assurance avec la société C, aux droits de laquelle viennent les sociétés D et E ; un vol a été perpétré dans ses locaux sans que l’alarme n’ait fonctionné ; et, après avoir indemnisé la société A, la société C, subrogée dans les droits de cette dernière, a assigné la société B en responsabilité ; la société J.P. X… et A. Y…, mandataire au redressement judiciaire de la société A, est intervenue volontairement à l’instance pour réclamer des dommages-intérêts.
Pour dire que l’article 5.6 de ses conditions générales est réputé non écrit et condamner la société A à payer aux sociétés D et E la somme de 892 177,50 euros et à la société A la somme de 432 412,22 euros, la Cour d’appel (CA Paris, 25 oct. 2016) relève que :
- s’agissant de l’application de l’article L. 442-6 du code de commerce, la mise en œuvre de la clause litigieuse impliquerait que la responsabilité de la société B ne saurait être engagée pour des dommages résultant du fonctionnement de l’installation ou de son non-fonctionnement pour quelque cause que ce soit ;
- cette disposition vide le contrat de ce qui fait son essence même, à savoir le bon fonctionnement de la prestation d’alarme pour prévenir le vol,
- et en déduit qu’une telle clause crée un déséquilibre significatif entre les obligations des parties aux dépens de la société A.
Selon le pourvoi, seul engage la responsabilité de son auteur, sur le fondement de l’article L. 442-6 I 2° du code de commerce, le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Le pourvoi fait donc grief à la Cour d’appel de s’être abstenue de caractériser en l’espèce l’existence d’une tentative de soumission ou d’une soumission de la société A à la clause litigieuse, et donc l’absence de pouvoir de négociation de cette société, la cour d’appel privant ainsi sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6 I 2° précité.
Par l’arrêt commenté, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel de Paris dans les termes suivants : « Qu’en se déterminant ainsi, sans caractériser l’existence d’une tentative de soumission ou d’une soumission de la société Avenir à la clause litigieuse, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».
La solution adoptée par la Cour de cassation n’est guère surprenante. Le constat d’une absence de pouvoir réel de négociation paraît suffire pour caractériser la soumission, et l’importance de caractériser l’existence ou non d’un pouvoir de négociation a été soulignée par la Cour de cassation dans une décision Darty (Cass. com., 26 avr. 2017, n°15-27865). Mais encore fallait-il la caractériser. En s’abstenant de caractériser l’existence de cette condition essentielle à l’application du texte de l’article l’arrêt objet du pourvoi ne pouvait qu’être cassé.
A rapprocher : Panorama de jurisprudence 2016 – 2017 (116 décisions et avis commentés)