Cass. com., 9 mai 2018, n°16-26.926
« Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus » …
Ce qu’il faut retenir : « Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus », mais les engagements conclus postérieurement au cautionnement ne sont pas pris en considération même si leur principe était connu du créancier au jour du cautionnement.
Pour approfondir : Dans le cadre d’un seul et unique projet professionnel nécessitant l’obtention de deux prêts bancaires au bénéfice de sa société, une personne physique a souscrit deux cautionnements auprès des banques prêteuses :
- d’abord, avec le CIC NORD OUEST le 4 mai 2011 ;
- puis, avec le CREDIT AGRICOLE.
La société ayant été placée en liquidation judiciaire avant d’avoir remboursé intégralement l’un des deux prêts (accordé par le CIC NORD OUEST), le CIC NORD OUEST a assigné la personne physique en exécution de son engagement de caution.
Pour se défendre, la caution a invoqué la disproportion de son engagement.
La caution considérait que le second engagement de caution auprès du CREDIT AGRICOLE (pour un montant de 224 900 €) devait être pris en considération même s’il a été conclu postérieurement au cautionnement auprès du CIC NORD OUEST car :
- le CIC NORD OUEST savait que le projet professionnel était cofinancé par le CREDIT AGRICOLE ;
- le CIC NORD OUEST savait que le CREDIT AGRICOLE solliciterait également un cautionnement ;
- le CIC NORD OUEST aurait dû solliciter des informations relativement à ce second (mais très probable) cautionnement puisqu’il ne figurait pas sur la fiche de renseignement fournie par la caution au CIC NORD OUEST.
La Cour de cassation n’a pas suivi ce raisonnement (approuvant ainsi la Cour d’appel) : « la disproportion du cautionnement s’apprécie en prenant en considération l’endettement global de la caution au moment où cet engagement est consenti, sans avoir à tenir compte de ses engagements postérieurs, fussent-ils souscrits dans le cadre du financement d’une même opération dont les modalités étaient connues du créancier ». Partant, puisque « à la date de conclusion du cautionnement [litigieux, la caution] n’avait encore signé aucun autre engagement de caution dans le cadre de l’opération financée, la Cour d’appel en a exactement déduit qu’il ne devait pas être tenu compte, pour l’évaluation de son endettement global à cette date, de l’engagement souscrit postérieurement au bénéfice [du CREDIT AGRICOLE] ». Bien que ce raisonnement de la caution n’ait rien d’absurde (et paraît même au contraire conforme à l’esprit du texte), la Cour de cassation a préféré adopter une appréciation très stricte du texte de l’article L.341-4 du Code de la consommation (devenu aujourd’hui l’article L.332-1).
A rapprocher : Cass. com., 3 nov. 2015, n°14-26.051 et 15-21.769