CA Paris, 5 septembre 2019, RG n°17/02353
La clause subordonnant la possibilité pour un client de contester une facture au paiement préalable de 90 % de son montant ainsi qu’au respect d’un délai impossible est une clause abusive, en ce qu’elle a pour effet de supprimer l’exercice d’actions en justice interdite.
Une société civile coopérative (qui devait notamment gérer la restauration de retraités) a conclu un contrat avec une société de restauration. La société de restauration a assigné sa cocontractante en raison d’importantes factures impayées. Les juges de première instance ont condamné la société civile coopérative au paiement des factures.
Pour contester la condamnation prononcée à son encontre, la société civile coopérative a invoqué l’inopposabilité de l’article 7.3.2 du contrat (relatif au paiement et contestation des factures émises) en raison de son caractère abusif.
La cour d’appel lui a donné raison. En effet :
- l’article R.212-2 du Code de la consommation prévoit que sont présumées abusives au sens de l’article L.212-1, les clauses ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou entraver l’exercice d’actions en justice ou des voies de recours par le consommateur ;
- or, en l’espèce, l’article 7.3.2 du contrat, en subordonnant la possibilité pour la société civile coopérative de contester la facture au paiement préalable de 90 % de son montant ainsi qu’au respect d’un délai impossible (impossible car le délai de contestation des factures avait pour point de départ la date de la facture et non la date de son envoi, donc la société de restauration avait la faculté de n’adresser la facture à sa cocontractante que postérieurement à l’expiration du délai imparti pour la contester), avait pour effet de supprimer l’exercice d’actions en justice ;
- par conséquence, la clause de l’article 7.3.2 doit donc être considérée comme abusive.
A noter l’article L.212-1 sanctionnant les clauses abusives s’applique aux contrats conclus entre un professionnel et un consommateur mais également aux contrats conclus entre un professionnel et un non-professionnel (une personne morale qui n’agit pas à des fins professionnelles). Les clauses abusives peuvent ainsi être soulevées par des sociétés.
A rapprocher : Cass. com., 4 juillet 2019, n°18-10.077